Charles Massi, le casse-cou

L’axe N’Djamena-Bangui est solide, le chef rebelle l’a appris à ses dépens.

Christophe Boisbouvier

Publié le 27 août 2009 Lecture : 2 minutes.

Le Tchad base arrière des rebelles centrafricains ? L’ancien ministre Charles Massi y a cru. À ses dépens. En avril dernier, quand il débarque à N’Djamena, ses affaires se présentent plutôt bien. Il vient de prendre la tête d’un mouvement rebelle du nord de la Centrafrique, la CPJP (Convention des patriotes pour la justice et la paix) et il est reçu à la présidence tchadienne par deux proches collaborateurs d’Idriss Déby Itno. Message des Tchadiens : « Si vous voulez dialoguer avec le pouvoir à Bangui, nous pouvons vous aider. Revenez nous voir dans quelque temps. »

Le problème, c’est que Massi ne repart pas du Tchad. Discrètement, il quitte N’Djamena en taxi-brousse. Direction le sud. Le 16 mai, à Sarh, il loue les services d’un moto-taxi clandestin afin de rejoindre ses hommes à la frontière centrafricaine. Pour éviter un poste de contrôle à la sortie sud de Sarh, il traverse une rivière en pirogue et emprunte une piste parallèle à la route. Mais il est arrêté par une patrouille tchadienne. Manque de chance ? Le chef rebelle a surtout commis l’erreur de ne pas éteindre son téléphone portable. Les services tchadiens le suivaient à la trace…

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Que faire de Charles Massi ? Au début, Idriss Déby Itno est furieux. « Massi est venu au Tchad par la grande porte et a voulu ressortir par la petite », lance son ministre de l’Intérieur. « Il a voulu nous dribbler ! » lâche un autre familier du Palais. Le rebelle centrafricain est ramené à N’Djamena où il est enfermé dans un commissariat – une sorte de quartier VIP où logent déjà quatre ou cinq prisonniers tchadiens. À Bangui, on se frotte les mains. Mais les pressions en faveur de sa libération se multiplient. Et le 8 juillet, l’opposant est relâché. N’Djamena sonde alors Bangui pour savoir si un dialogue est possible. Réponse : « les rebelles de la CPJP doivent d’abord désarmer ». Bref, François Bozizé ne veut pas de médiation tchadienne et, depuis sa libération, Charles Massi ronge son frein à N’Djamena.

Le rebelle a-t-il joué au casse-cou ? Pas si simple. En mars 2003, François Bozizé a tenté le même coup… et a réussi ! C’est en effet à partir du territoire tchadien que ses troupes ont lancé leur raid victorieux sur Bangui. Et, comme Massi, le général Bozizé s’était offert un voyage clandestin. En février 2003, alors qu’il était bloqué en France depuis quatre mois à la suite d’un accord Déby-Patassé, il était passé discrètement en Belgique et avait pris un vol pour N’Djamena sous un faux nom.

Cela dit, la comparaison s’arrête là. À l’époque, le Tchad – et le très influent Gabon d’Omar Bongo – soutenait le rebelle Bozizé. Aujourd’hui, Charles Massi est bien seul. Confidence d’un connaisseur du dossier : « Déby estime que Massi n’a pas de troupes. » Vrai ou faux ? « De toute façon, il ne faut pas que le coup de 2003 fasse école », lâche un ministre à N’Djamena. « Le Tchad ne peut pas être le couloir par où passent tous les Centrafricains pour déstabiliser leur pays. » Neuf ans après le « coup de pouce » du Tchad, l’axe Déby-Bozizé tient toujours.

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