Au secours, les esprits s’échauffent !

Publié le 1 septembre 2009 Lecture : 5 minutes.

Sous l’effet de la chaleur de l’été moyen-oriental, tout le monde perd la tête. Prenez, par exemple, la dernière déclaration du général David Richards, qui, après avoir dirigé les troupes de Sa Gracieuse Majesté en Afghanistan, est sur le point de devenir le nouveau chef d’état-major, et donc le numéro un, de l’armée. Au moment où tombait la dernière victime britannique (on approche des 200 morts), il a prédit – horreur ! – que la construction d’un État afghan « pourrait prendre de trente à quarante ans », ajoutant que « l’Otan n’a aucune chance » de quitter le pays avant cette échéance.

C’est pure folie. Personne n’a donc appris à sir David ce qu’il advint de l’armée britannique en Afghanistan, en 1842, quand un seul soldat, sur 15 000 hommes, put regagner l’Angleterre vivant ? A-t-il oublié l’échec de l’armée soviétique, dans les années 1980 ?

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Cette guerre post-coloniale aux objectifs mal définis est une énorme erreur. Elle se terminera dans les larmes. Au lieu d’isoler et d’anéantir Oussama Ben Laden et sa clique d’extrémistes cachés dans les montagnes, elle ne fait que cimenter les liens entre ces derniers et les tribus pachtounes, qui forment l’essentiel des effectifs talibans. Au lieu d’éliminer les terroristes, elle en crée de nouveaux.

Ces tribus guerrières détestent que les étrangers se mêlent de leurs affaires. Elles mourront les armes à la main pour les chasser de leur terre et tueront de nombreux jeunes soldats britanniques et américains. Laissons les Afghans construire leur État.

De même que l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair avait été incapable de résister aux pressions de George W. Bush pour attaquer l’Irak, l’actuel Premier ministre Gordon Brown a enfoncé la Grande-Bretagne plus profondément encore dans le bourbier afghan. Il est temps d’en sortir.

Menaces contre le Hezbollah

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Autre fauteur de guerre, le ministre israélien de la Défense, Ehoud Barak, qui a été jusqu’à présent incapable de passer du statut de tueur en série à celui d’homme d’État, décevant les espoirs que beaucoup avaient placés en lui. Au lieu d’accueillir favorablement la plate-forme politique adoptée par le Fatah lors de son sixième congrès à Bethléem (du 4 au 10 août), qui réaffirme la nécessité d’une solution à deux États, Barak l’a qualifiée d’« inacceptable ». Quant à Avigdor Lieberman, l’extrémiste ministre des Affaires étrangères, il a estimé que cette plate-forme « avait enterré toute chance de parvenir à la paix avec les Palestiniens » ! Les Israéliens devraient se réveiller : l’intransigeance de leurs dirigeants est suicidaire.

Barak a également proféré de terribles menaces contre le Hezbollah libanais. « Nous ne pouvons accepter qu’un État voisin, membre de l’ONU, compte dans son gouvernement des membres d’une milice qui possède plus de 40 000 missiles », a-t-il déclaré, sans mentionner l’arsenal autrement plus dangereux dont dispose Israël. « Ce qui s’est passé au cours de la guerre du Liban, à l’été 2006, ne se reproduira plus jamais. À l’époque, les États-Unis nous avaient demandé d’épargner les infrastructures. La prochaine fois, nous utiliserons tous les moyens que nous jugerons nécessaires », a-t-il conclu.

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Lors de cette guerre, l’armée israélienne a tué plus de 1 200 Libanais, des civils pour la plupart, et détruit de nombreuses infrastructures, ainsi qu’une grande partie de Beyrouth-Sud.

À son tour, Benyamin Netanyahou, le Premier ministre israélien, a sommé son homologue libanais, Saad Hariri, de ne pas inclure des membres du Hezbollah dans son gouvernement – faute de quoi il en subirait les conséquences.

Quand Israël cessera-t-il d’agresser ses voisins et décidera-t-il enfin de vivre en paix à leurs côtés ? Le fait que le département d’État américain persiste à qualifier le Hezbollah d’« organisation terroriste » plutôt que de le reconnaître comme un mouvement de résistance nationale légitime ne fait qu’encourager les tendances belliqueuses d’Israël. On oublie évidemment de rappeler que c’est le Hezbollah qui a contraint l’armée israélienne à se retirer du Sud-Liban en 2000, après dix-huit ans d’occupation, et à un match nul en 2006.

Au Congrès, à Washington, le dégel relatif des relations américano-syriennes a provoqué les habituels commentaires indignés des parlementaires pro-israéliens. Ileana Ros-Lehtinen, représentante républicaine de la Floride, qui siège à la commission des affaires étrangères, s’est dite « profondément troublée que les États-Unis fassent des concessions unilatérales au régime syrien ». Eliot Engel, représentant démocrate de New York, a renchéri que « la Syrie n’a pas changé ».

Attaquer l’Iran

Après avoir publié deux tribunes de John Bolton, « faucon » de l’administration Bush et ancien ambassadeur des États-Unis à l’ONU, appelant Israël à bombarder les sites nucléaires iraniens, le Wall Street Journal a ouvert ses colonnes à Chuck Wald, un général de l’armée de l’air en retraite, pour plaider en faveur d’une attaque américaine. Si les pressions diplomatiques et économiques échouaient, écrivait-il le 6 août, une frappe contre l’Iran serait techniquement réalisable et constituerait une option crédible. Les risques d’une intervention militaire doivent être comparés à ceux de l’inaction, ajoutait-il en énumérant ces derniers : « domination de l’Iran sur la région pétrolière du Golfe, mise en péril de l’existence d’Israël, déstabilisation de l’Irak et des régimes arabes alliés des États-Unis, échec du processus de paix israélo-palestinien, course à l’atome ».

Chacun de ces prétendus risques repose sur une analyse erronée. L’Iran, qui est déjà la grande puissance régionale, agit avec mesure. Il entretient de bonnes relations avec ses voisins du Golfe – Émirats arabes unis, Qatar et Oman en particulier – et ne menace nullement l’existence d’Israël. Au contraire, c’est ce dernier qui, avec son arsenal nucléaire, menace ses voisins.

Ce n’est pas l’Iran, mais l’Amérique (incitée à cela par Israël et ses amis) qui a détruit et déstabilisé l’Irak, et y a installé un régime dominé par des chiites proches de l’Iran.

La fin du processus de paix israélo-palestinien ? Mais ce processus n’existe simplement pas, en raison de l’opposition viscérale d’Israël à tout ce qui pourrait ressembler à un État palestinien indépendant.

La chaleur de l’été semble avoir empoisonné l’atmosphère. La politique de Barack Obama en faveur de la paix est menacée par les fauteurs de guerre de tout poil. Il doit agir vite et avec fermeté s’il veut que les espoirs qu’il a suscités ne soient pas déçus.

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