Les secrets de Belliraj
Beaucoup d’interrogations après la condamnation du « chef terroriste » belgo-marocain.
Dans le jargon judiciaire, cela s’appelle « porter le sombrero ». En écopant, le 28 juillet, de la réclusion criminelle à perpétuité, Abdelkader Belliraj, belgo-marocain de 51 ans, échappe à la peine de mort requise contre lui par la justice marocaine. Mais, tout de même, la condamnation semble bien lourde pour un dossier d’accusation particulièrement confus et mal ficelé.
Officiellement, Belliraj et ses trente-cinq complices devaient répondre d’« atteinte à la sûreté intérieure de l’État », « association de malfaiteurs en vue de préparer et commettre des actes terroristes », « meurtre avec préméditation », « tentative d’homicide volontaire avec préméditation », « vol qualifié et tentative de vol qualifié », ainsi que « détention illégale d’armes et d’explosifs ». Parmi les coaccusés, Mustapha Moatassim et Mohamed Marouani, dirigeants du parti islamiste Al-Badil al-Hadari, aujourd’hui dissous, ont été condamnés à vingt-cinq ans de réclusion. Les autres complices ont écopé de peines d’un an à trente ans de prison.
Interpellé en février 2008, Belliraj est accusé d’avoir fait entrer au Maroc un important stock d’armes et d’avoir tenté de déstabiliser la monarchie en mettant en place un dangereux réseau islamiste d’inspiration chiite. Pour faire bonne mesure, Belliraj est aussi soupçonné d’être impliqué dans l’assassinat de six personnes en Belgique au début des années 1990, le braquage d’un fourgon de la Brink’s au Luxembourg en 2000 et de s’être rendu en Afghanistan et dans les maquis islamistes algériens pour y rencontrer des salafistes. Selon la presse belge, enfin, il aurait également projeté de tuer six personnalités juives, dont l’essayiste français Bernard-Henri Lévy.
Plus de six mois de procès devant la cour antiterroriste de Salé n’ont pas permis d’éclaircir ce dossier fourre-tout pollué dès le début par le rôle, réel ou supposé, des services secrets marocains et surtout belges dont Belliraj aurait été l’un des informateurs privilégiés. Malgré ses dénégations, l’accusé ira donc rejoindre dans les geôles chérifiennes un autre « terroriste » au parcours incertain, le Français Richard Robert, condamné lui aussi à perpétuité. Et bien connu des services secrets français.
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