L’épidémie de Sida favorisée par la crise
Des progrès compromis par le manque de moyens.
Comme un symbole, la 5e conférence de l’International Aids Society (IAS) s’est déroulée au Cap, en Afrique du Sud, du 18 au 22 juillet. Un signe fort, car lors de la dernière conférence sur le VIH organisée dans ce pays, à Durban, en 2000, la communauté internationale avait souligné l’injustice faite aux malades du Sud dans l’accès aux traitements. Dans ce pays s’est également tenu le procès dit de Pretoria, qui a permis de réduire les coûts des médicaments à destination des pays en développement (PED). Et c’est enfin les activistes sud-africains qui ont lutté contre les dirigeants de leur pays niant l’ampleur de l’épidémie. Bref, la nation Arc-en-Ciel, très en retard, a fini par faire de la lutte contre la pandémie une priorité. Aujourd’hui, ce pays compte plus de 5 millions de séropositifs, sur les 22 millions recensés sur le continent et 33 millions dans le monde.
Michel Kazatchkine, directeur exécutif du Fonds mondial de lutte contre le sida, souligne « le virage pris par le pays, où 780 000 personnes sont sous traitement », alors que seules 50 000 y avaient accès en 2004. Dans l’ensemble des PED, elles sont désormais 4 millions à bénéficier de médicaments – elles étaient 250 000 il y a cinq ans –, soit une couverture de 40 % des besoins, assumée pour moitié par le Fonds mondial et pour l’autre par le Pepfar, l’initiative de lutte contre le sida dans quinze pays du Sud mise en œuvre par le président américain George W. Bush et confirmée par son successeur Barack Obama. De réels progrès sont enregistrés. La mortalité liée au sida chute au Botswana ou au Malawi ; elle a diminué de 60 % à Addis-Abeba, en Éthiopie. Parallèlement, la recherche évolue, confirme Françoise Barré-Sinoussi, Prix Nobel 2008 de médecine.
Mais, la crise économique aidant, cette dynamique pourrait rapidement s’inverser. Stephen Lewis, coprésident de Aids-Free World, remarque que « les milliards manquant à la lutte contre le sida ne sont rien à côté de ceux que l’on a trouvés en 2008 pour renflouer d’autres secteurs ». Pourtant, il n’est plus à prouver que la bonne santé d’une population est un facteur essentiel au développement. Mais la crise qui frappe les économies des PED et la stagnation de l’aide au développement ainsi que celle des contributions des États du Nord au Fonds mondial ne laissent rien présager de bon. Le Fonds anticipe d’ailleurs un déficit de 3 milliards de dollars en 2010 : ce sont les patients qui en souffriront, la disponibilité de leurs traitements étant, de nouveau, remise en question.
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