Vive l’Indonésie !
Le résultat officiel de l’élection présidentielle indonésienne du 8 juillet ne sera annoncé qu’à la fin du mois. Ce délai peut paraître long mais n’a rien d’étonnant dans un pays qui compte plus de 6 000 îles habitées (sur 17 000 îles, au total), 235 millions d’habitants et plus de 160 millions d’électeurs inscrits. Les deux grands vainqueurs du scrutin sont néanmoins connus. Il s’agit de Susilo Bambang Yudhoyono, qui, à en juger par les sondages, sera réélu à coup sûr à la tête de l’État. Et de la démocratie.
Vainqueur dès le premier tour avec sans doute plus de 60 % des voix, l’ex-général javanais a donc nettement amélioré son score de 2004 : il ne l’avait alors emporté qu’au second tour sur Megawati Sukarnoputri, la présidente sortante, après avoir réuni environ un tiers des suffrages au premier. Une consécration pour cet homme dont, il y a cinq ans, on estimait qu’il constituait un espoir de changement face à une dirigeante historique, longtemps chef de l’opposition, qui, une fois au pouvoir, avait déçu par son immobilisme.
Le scrutin présidentiel a surtout démontré qu’un immense pays ayant subi trente ans de dictature pouvait fort bien installer pacifiquement, en quelques années, un régime démocratique solide. À la fin du XXe siècle, l’Indonésie vivait encore sous la férule d’un dictateur, le général Suharto, dirigeant d’un régime militaire violent (500 000 morts après l’éviction de Sukarno, en 1965). Renversé à la suite de manifestations monstres provoquées par son incapacité à faire face à la « crise asiatique » de 1997, il avait dû laisser la place à une opposition jusque-là persécutée. Cette période de transition, au cours de laquelle le choix des dirigeants restait largement contrôlé par l’armée, avait, en 2004, abouti à la première élection du chef de l’État au suffrage universel. Avec cette deuxième élection présidentielle transparente, suivant de près des législatives qui ne l’étaient pas moins, l’Indonésie, qui a renvoyé en douceur les militaires dans leurs casernes et retrouvé le chemin d’une forte croissance économique, s’est définitivement installée dans un modèle démocratique.
Un modèle qui a permis le déroulement d’une campagne électorale certes animée, mais qui n’a donné lieu à aucun incident sérieux, qui a débouché sur la tenue d’élections dont les perdants ne contestent pas le résultat, sauf à la marge, et ouvert une réelle possibilité d’alternance. Le plus grand pays musulman de la planète est désormais la plus grande démocratie du Sud, après l’Inde. Dommage que les médias internationaux, si prompts à fustiger les dérapages en terre d’islam, n’aient guère prêté attention à cette belle leçon.
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