Youssou N’Dour fait son show

Publié le 16 juillet 2009 Lecture : 3 minutes.

Dakar, 20 juin. Ce samedi matin, c’est le grand jour. À l’occasion du lancement de la campagne de sensibilisation à la lutte contre le paludisme, l’ONG américaine Malaria No More (MNM) et la Fondation Youssou N’Dour ont organisé une « caravane musicale » qui doit traverser les banlieues défavorisées de la capitale : Grand Médine, Guediawaye, Pikine… Le soir, un grand concert au stade Amadou-Barry de Pikine-Guediawaye va réunir les plus grandes vedettes sénégalaises.

Le paludisme tue environ 3 000 enfants de moins de 5 ans chaque jour en Afrique. En attendant le vaccin, seule la prévention et l’éducation peuvent sauver des vies. Des croyances subsistent encore – même dans les milieux aisés – sur le mode de propagation du parasite. Certains prétendent, par exemple, que les mangues crues sont responsables de l’infection. Mais il y a pire. Les moustiquaires sont souvent monopolisées par les hommes, alors qu’elles sont données en priorité aux femmes ou aux enfants… D’où la nécessité d’en distribuer toujours plus. Rien que cette année, du 22 au 30 juin, les deux ONG ont fourni deux millions de moustiquaires imprégnées à des femmes enceintes et à des familles ayant des enfants de moins de 5 ans.

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À 10 h 30, devant le Yengoulène, une boîte de nuit tendance où se dresse une immense sculpture en forme de baobab, berlines et camions arrivent de tous côtés, transportant le matériel nécessaire à l’organisation de la caravane. Quand celle-ci démarre, Youssou N’Dour entame de sa voix inimitable « Xeex Sibiru ! » (« Combattre le paludisme », en wolof). Ce tube, qu’il a enregistré avec d’autres interprètes comme Viviane N’Dour, Souleymane Faye ou Pape Diouf, raconte l’histoire d’un homme amoureux qui, souffrant de paludisme, est quitté par sa dulcinée, car elle le juge irresponsable de ne pas s’être suffisamment protégé. « Les paroles sont faites pour toucher un maximum de gens, pour qu’ils s’identifient à la situation », explique l’artiste.

Une fois arrivée à Pikine, la foule grandit autour du 4×4 de Youssou N’Dour. Les enfants laissent de côté leurs occupations et courent à sa rencontre. Les ménagères bondissent hors de chez elles, les ustensiles de cuisine encore à la main, en criant : « Youssou ! Youssou ! »

Un long combat

Tous les 5 km, la star arrête le convoi pour prononcer un discours encourageant la population à utiliser des moustiquaires imprégnées et à acheter des médicaments. « Le paludisme est encore perçu comme faisant partie du décor, c’est un risque à prendre comme un autre, confie l’artiste. Moi-même, il y a six ans, je n’y prêtais pas attention. Puis, un jour, des médecins m’ont fait comprendre qu’on pouvait sauver un grand nombre de gens, et j’ai décidé d’agir. »

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« Pendant les prochaines années, tous les moyens seront mobilisés pour responsabiliser la population : sport, médias, religion… », promet de son côté Boubacar N’Dour, frère et producteur de Youssou, qui a préparé le lancement de la campagne dans le plus grand secret. « Cela aurait été la cohue, explique-t-il. Deux jours ont suffi pour tout organiser et la surprise est d’autant plus belle ! »

Les efforts des ONG seront-ils couronnés de succès ? Le combat risque d’être long. Malgré l’exploitation de la notoriété phénoménale de Youssou N’Dour pour la lutte contre le paludisme, dès que les festivités sont terminées, les Dakarois retournent à leur conversation favorite sur la volonté supposée du président Abdoulaye Wade de passer le flambeau à son fils, Karim, et la nécessité de l’en empêcher. « Karim s’est présenté aux municipales de Dakar, et on a tout fait pour qu’il perde. Maintenant, il faut qu’il comprenne : s’il tente la présidentielle de 2012, on sort tous dans la rue ! » menace, par exemple, Djidjak, un employé de Youssou. À ses yeux, la lutte contre le paludisme n’est peut-être déjà plus une priorité…

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