Comment le Rwanda a redressé la barre

Le petit pays d’Afrique de l’Est recueille les fruits de deux ans de réformes pour moderniser son économie, attirer les investisseurs et doper les exportations.

Publié le 7 juillet 2009 Lecture : 4 minutes.

« Un nectar à redécouvrir. » C’est avec ce slogan que Starbucks Coffee vendra le café rwandais dans 700 points de vente du Royaume-Uni dès le début de 2010. L’annonce a été faite à Kigali le 29 juin par le PDG de la multinationale américaine : le Bourbon Arabica du Rwanda fera l’objet d’offres promotionnelles tout au long de l’année. En visite dans ce pays de 10 millions d’habitants, Howard Schultz, patron de 17 000 boutiques, a également inauguré un Centre de soutien aux producteurs qui travaillera avec les paysans de la région pour qu’ils obtiennent la certification Fairtrade. Une garantie de « commerce équitable » à laquelle les consommateurs britanniques sont particulièrement attentifs et sur laquelle Starbucks construit une partie de son image, achetant chaque année 9 000 tonnes de tels cafés, soit 5 % de sa consommation totale. Le Rwanda compte 128 coopératives, dont une seule fournit aujourd’hui Starbucks. En 2008, elles ont produit 22 000 tonnes de café, représentant 47 millions de dollars, sa principale recette d’exportation (40 %, et plus de 50 % avec le thé). L’objectif est de porter ce montant à 120 millions de dollars en 2011, pour une production de 35 000 tonnes. 

Valoriser le haut de gamme

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« Nous tirons le maximum du café et du thé, en choisissant les variétés les plus recherchées, et nous nous diversifions vers d’autres produits haut de gamme comme la soie et le cuir », explique Clare Akamanzi, directrice générale adjointe du Rwanda Development Board (RDB). Cheville ouvrière de cette structure chargée de stimuler les exportations et les investissements, elle accumule les bonnes nouvelles en cette fin juin. Le 23, le RDB signait avec le centre néerlandais de promotion des importations (CBI) et la Fédération rwandaise des entreprises privées (Private Sector Federation, PSF) une convention d’assistance technique pour la promotion des produits rwandais en Europe. La méthode a fait ses preuves au Kenya, désormais grand exportateur de fleurs. C’est la seconde convention signée en deux ans avec le Rwanda ; la première a représenté un investissement de 1,5 million de dollars, dont 1 million venant du CBI et le reste d’appuis logistiques de la Riepa, l’agence de promotion des investissements et des exportations, sorte d’ancêtre du RDB.

Créé à la fin de 2008, sur le conseil de l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair, et opérationnel depuis janvier, le Rwanda Development Board réunit notamment, outre la Riepa, l’Office du tourisme et des parcs nationaux (ORTPN) et la Rwanda Information Technology Authority (Rita), chargée de créer une société de l’information. Le gouvernement dépense chaque année plus de 50 millions de dollars dans ce domaine. Il s’est porté acquéreur de 10 000 ordinateurs auprès de la fondation One Laptop Per Child (OLPC), qui a écoulé plus d’un demi-million de ses PC à 100 dollars dans le monde. Trois cents étudiants ont été envoyés cette année en Inde pour développer leurs compétences en logiciels. La stratégie informatique du pays lui a valu un long article de Sarah Lacy, spécialiste des nouvelles technologies du Washington Post dans l’édition du 29 juin – jour décidément propice à l’image internationale du Rwanda.

Insensible aux compliments, Clare Akamanzi égrène les réformes engagées. « Toutes les agences et institutions gouvernementales sont concernées », ajoute-t-elle en évoquant la refonte en cours du droit commercial. La ligne directrice de son action a été donnée par la présidence de la République en 2007, quand Paul Kagamé a décidé d’améliorer le classement de son pays dans le rapport Doing Business de la Banque mondiale (158e). Publié chaque année en septembre, le document établit le palmarès de 181 économies en fonction de la qualité de l’environnement des affaires, critère fondamental pour attirer les investisseurs et développer les échanges commerciaux. Deux ans plus tard, le Rwanda est arrivé 139e, non loin de l’Algérie (132e) et devant le Sénégal (150e) dans ce classement où seuls trois pays africains figurent parmi les 100 premiers (Maurice, Afrique du Sud et Tunisie). Dans la dernière édition, le Rwanda se trouve parmi les vingt premiers réformateurs grâce à des améliorations dans trois domaines : la création d’entreprises (11 places gagnées), l’accès au foncier et aux permis de construire (35 places) ainsi que l’accès à la propriété (78 places).

Sur les dix indicateurs du rapport Doing Business, trois méritent encore des efforts : l’accès au crédit (le Rwanda est 145e), la protection des investisseurs (170e) et le commerce transfrontalier (168e). Sur ce dernier plan, les efforts ont jusqu’à présent porté sur la simplification des procédures administratives, ce qui a permis de diminuer de 40 % les délais de livraison. Mais le pays souffre de son enclavement : les coûts par conteneur acheminé depuis ou vers le Rwanda sont jusqu’à deux fois plus élevés que pour son voisin Tanzanien. Côté accès au crédit, la libéralisation du secteur bancaire et l’arrivée cette année de géants tels qu’Ecobank ou Access Bank devraient permettre de gagner des points. Il le faudra, de toute façon : l’équipe de travail nationale Doing Business Unit s’est fixé pour objectif d’être dans les dix premiers pays réformateurs du prochain rapport. Rendez-vous en septembre.

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