Robert Ménard jette l’éponge

S’estimant bâillonné, l’ancien patron de Reporters sans frontières démissionne de son poste de directeur du Centre de Doha pour la liberté de l’information.

ProfilAuteur_SamyGhorbal

Publié le 30 juin 2009 Lecture : 2 minutes.

L’aventure a finalement tourné court : Robert Ménard, le directeur du Centre de Doha pour la liberté de l’information, la première organisation internationale de défense des journalistes basée dans un pays du Sud, en l’occurrence le Qatar, a annoncé sa démission le 23 juin. L’ancien secrétaire général de Reporters sans frontières (RSF), qui était entré en fonctions en octobre 2008, estime que le centre est asphyxié par le manque de liberté et qu’il n’a plus les moyens de travailler à Doha. Il faisait l’objet depuis plusieurs semaines de virulentes attaques des éditorialistes locaux, qui l’accusaient « d’insulter le Qatar » ou de « porter atteinte à l’islam » en faisant l’éloge du blasphème au nom de la liberté d’expression. En mars dernier, il avait interpellé publiquement les autorités et menacé, déjà, de démissionner.

Le départ de Robert Ménard constitue un camouflet pour Cheikha Mozah, la très influente épouse de l’émir, Cheikh Hamad Ibn Khalifa Al Thani. Elle avait été à l’origine de la venue du Français et lui avait donné carte blanche pour agir. Il avait posé ses conditions : pas question de faire une Al-Jazira bis, version ONG, et de passer sous silence les lacunes et imperfections du code de la presse qatari, l’un des plus restrictifs au monde. Mais son refus de subordonner le Centre de Doha aux intérêts politiques et diplomatiques du Qatar a fortement indisposé en haut lieu. Dans une interview à Jeune Afrique, en mai (n° 2522), Ménard le reconnaissait : Cheikha Mozah et lui avaient sous-estimé les réticences des milieux conservateurs. Il accusait, sans le nommer, le Premier ministre et ministre des Affaires étrangères, Cheikh Hamad Ibn Jassim Al Thani, de vouloir le remplacer par un homme plus docile. Robert Ménard, en épinglant l’archaïsme des lois sur la presse et en s’en prenant frontalement aux autorités, a sans doute fait preuve de maladresse et voulu brûler les étapes. Il a fait un pari et a perdu, mais il reste persuadé malgré tout que l’aventure méritait d’être tentée. En attendant, son départ risque de réduire à néant la crédibilité du Centre de Doha…

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