Feuilleton Khalifa (suite)
L’actualité judiciaire s’emballe pour les ressortissants algériens. Après l’annonce de l’ouverture, le 2 juillet, en France, du procès de Cheb Mami, une autre nouvelle est parvenue, de Londres cette fois. Le 25 juin, le tribunal de Westminster a autorisé l’extradition de Rafik Abdelmoumen Khalifa, le milliardaire algérien ruiné après une banqueroute frauduleuse (on évoque un détournement de l’ordre de 2 milliards de dollars). Cette décision constitue une victoire pour la justice et la diplomatie algériennes.
Sous le coup d’un mandat d’arrêt international, l’ancien tycoon s’était réfugié en Grande-Bretagne en 2003. Aussitôt, Alger demande son extradition. En décembre, le parquet de Nanterre (France) ouvre à son tour une information judiciaire pour « abus de confiance, banqueroute par détournement d’actifs et dissimulation de comptabilité, blanchiment en bande organisée ». Khalifa n’est pas inquiété pour autant.
Ses ennuis débutent en mars 2007, quand il est appréhendé dans le cadre d’un mandat d’arrêt européen. Une seconde demande d’extradition est introduite par la France, mais priorité est donnée à la demande algérienne. Débute alors une longue procédure qui consiste à étudier, sur la forme et sur le fond, les réquisitions algériennes. Les avocats de la défense invoquent les mauvais traitements que leur client risque de se voir infliger s’il était livré à la justice de son pays. Le juge Timothy Workman ne suit pas leurs plaidoiries. Convaincu que les assurances données par la justice algérienne sont « fiables et de bonne foi », le magistrat estime que l’extradition de Khalifa ne contrevient pas à la convention internationale des droits de l’homme. Un argument qui réjouit les diplomates et les juristes algériens, puisqu’il constitue un gage de respectabilité pour un pays longtemps accusé d’avoir recours à la torture.
La décision du tribunal de Westminster satisfait également l’opinion algérienne. La faillite de Khalifa Bank, propriété de l’ancien milliardaire, a en effet ruiné des milliers de petits épargnants qui, attirés par des taux d’intérêt de 17 % (contre 5 % maximum dans les autres établissements financiers du pays), y avaient déposé toutes leurs économies.
Jugé par contumace en 2007 par la cour criminelle de Blida, Khalifa avait été condamné à la réclusion perpétuelle au cours d’un procès public durant lequel – une première – des ministres et plusieurs personnalités s’étaient succédé à la barre.
Cependant, ce procès n’avait abordé que quelques aspects de ce qu’on qualifie en Algérie d’« arnaque du siècle ». D’autres volets du dossier doivent faire l’objet de nouveaux procès, notamment la distribution, par le sulfureux homme d’affaires, de cartes de crédit à des responsables politiques et à leurs enfants. L’extradition de Khalifa devrait accélérer l’ouverture de ces procès. Si cette perspective réjouit l’opinion, elle devrait en inquiéter certains.
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