Qui voulait (vraiment) la peau de « Pape »

MARWANE-BEN-YAHMED_2024

Publié le 22 juin 2009 Lecture : 3 minutes.

Quelle bouillabaisse ! L’Olympique de Marseille ne fait décidément rien comme les autres. Alors que le club préféré des Français – par ailleurs très populaire en Afrique – préparait sagement la saison à venir, du haut de ses trois qualifications successives en Ligue des champions, d’une stabilité retrouvée et de comptes enfin assainis, voilà qu’il sombre une nouvelle fois dans ses vieux travers.

Son président depuis juin 2005, Pape Diouf, a été débarqué le 17 juin dernier par le propriétaire du club, l’homme d’affaires Robert Louis-Dreyfus (RLD). « Je tiens à le féliciter pour le travail accompli. […] Il a été un grand président. […] Malheureusement, les divergences apparues nous empêchent de poursuivre l’aventure. » Ce communiqué officiel du « boss » est donc venu clore l’ultime chapitre d’un feuilleton à rebondissements opposant, en apparence du moins, Diouf à Vincent Labrune, président du conseil de surveillance du club et… homme de confiance de RLD.

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Premier acte d’une crise qui n’avait déjà plus rien de larvée, début juin, et premier tacle de Diouf dans la presse : « Très tôt, ce monsieur a outrepassé ses droits. Je me suis rendu compte qu’il voulait m’imposer des choses. Je lui ai donc répondu : “Certaines décisions, si tu penses les prendre, il faudra que tu viennes poser ton cul là où j’ai mis le mien.” À l’OM, c’est moi qui décide. » Une réponse publique à des attaques lancées en privé par Labrune, qui, à Paris, a largement utilisé son entregent médiatique (c’est un ex de TF1) pour critiquer l’ancien agent de joueurs, par journalistes et articles interposés.

« Ma seule erreur, reconnaît aujourd’hui Diouf, joint par téléphone, c’est d’avoir répondu publiquement aux incessantes attaques de Labrune qui, lui, avançait masqué. »

Panier de crabes

À plusieurs reprises, le président refuse d’assister aux réunions du conseil de surveillance. Et envoie une seconde salve à destination de Labrune, le 14 juin : « Je ne vais pas laisser la place à des aventuriers. Je me battrai bec et ongles contre ces dandys de Paris, prêts à remettre en cause un travail de cinq ans. » Le bras de fer commence.

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Soutenu par l’ensemble des supporteurs et par une grande partie des « gens qui comptent » dans le football français, fort d’un bilan flatteur malgré l’absence de titres, Diouf pensait peut-être remporter cette épreuve de force et obtenir plus d’autonomie. Voilà pour ce qui est connu. Ce qui l’est moins, c’est ce qui se trame vraiment dans les coulisses du club. Et là, on frôle le remake méridional de la série Dallas. L’OM est un panier de crabes, et son actionnaire majoritaire, très affaibli par une leucémie, est contraint de s’en remettre à sa garde rapprochée. Le véritable ennemi de Diouf se trouve en son sein, mais ce n’est pas le seul Vincent Labrune. Pape Diouf lui-même n’avait pas mesuré l’ampleur de ce qui se préparait contre lui : « La vérité, c’est que RLD est très malade. On lui a forcé la main. Quand nous nous sommes séparés après notre entrevue à Zurich, le 17 juin, il était en pleurs », raconte-t-il aujourd’hui. Dans l’entourage de Diouf, aucun doute : l’organisateur de cette éviction, c’est Jacques Veyrat, directeur général du groupe Louis-Dreyfus et… frère d’Antoine Veyrat, directeur général de l’OM, nommé président par intérim depuis l’éviction de Pape. Labrune n’est qu’un exécutant. « Jacques Veyrat veut faire de l’OM son joujou, explique un proche de Diouf. Son frère et Labrune ont tout orchestré pour obtenir de Robert la tête de Pape. »

L’avenir proche de Diouf ? Après avoir réglé ses comptes, dans tous les sens du terme, il va goûter un repos bien mérité. Il a déjà reçu quelques propositions, dont une de Joseph Blatter, le patron de la Fifa. « Franchement, là, je vais faire un break, explique-t-il. Ensuite, on verra bien. Marseille, Dakar, donner des cours de journalisme [son ancien métier], tout est possible. » Certains supporteurs rêvent déjà de le voir racheter le club, investisseurs à l’appui… Un club qui ne sait plus où il va. Le nouvel entraîneur, Didier Deschamps, « surpris et déçu », menace de faire ses valises, les joueurs, proches de Diouf, s’interrogent. Quant à RLD et Labrune, ils ont été déclarés persona non grata dans la cité phocéenne par les fans de l’OM. À Marseille, le foot est roi. Ubu aussi…

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