Salifou Fatimata Bazeye

Elle préside la Cour constitutionnelle, institution qui s’est prononcée contre le référendum proposé par le chef de l’État.

Christophe Boisbouvier

Publié le 9 juin 2009 Lecture : 2 minutes.

« C’est un magistrat intègre, et il n’y en a pas beaucoup comme elle », dit perfidement un de ses vieux compagnons. Le 25 mai, Salifou Fatimata Bazeye est devenue – bien malgré elle – une icône de la démocratie. Ce jour-là, la Cour constitutionnelle a dit non au projet du président Tandja de rester au pouvoir au-delà de décembre prochain. Or c’est elle qui préside la Cour. Mieux, parmi les sept membres de la Cour, c’est la seule personne qui a été nommée par le chef de l’État. Une nomination dont il doit se mordre les doigts…

Au début de sa carrière, madame la substitut travaille sans bruit. Originaire de la région de Zinder et diplômée de l’École nationale de la magistrature de Paris, elle siège au parquet, ce qui n’est pas franchement un gage d’indépendance. Mais ensuite, à la Cour suprême, elle s’émancipe. En 2005, elle refuse d’entériner la mutation de magistrats grévistes. Colère du gouvernement. À 55 ans, elle est priée de partir à la retraite. Curieusement, en 2007, c’est le même régime qui la désigne à la Cour constitutionnelle. Mais dans l’intervalle, le Premier ministre Hama Amadou a été évincé. Peut-être Mamadou Tandja se dit-il qu’elle lui sera reconnaissante de ce limogeage… Mauvais calcul ! 

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En janvier dernier, elle sort du bois. Les corps constitués sont réunis pour présenter leurs vœux au chef de l’État. Tout le monde pense à la future présidentielle, mais personne n’ose en parler. Seule, elle lance au président : « 2009 sera une année électorale, et la Cour veillera au respect de la légalité républicaine. » Grand silence dans le Palais des congrès de Niamey…

À première vue, Salifou Fatimata Bazeye ne paie pas de mine. Mariée à un haut fonctionnaire des finances et mère d’une famille nombreuse, elle est d’un tempérament réservé et n’aime pas l’ostentation. « C’est une femme très croyante, mais elle n’est pas du genre à suspendre une audience pour aller prier à la mosquée », lâche un habitué du palais de justice. Surtout, elle ne se départ jamais de son calme. « Depuis vingt-cinq ans, je ne l’ai jamais vue se mettre en colère », constate Me Coulibaly, le bâtonnier de Niamey. « Oui, c’est vrai, elle ne crie pas mais, justement, quand elle commence à hausser le ton, on fait attention. Elle a une autorité naturelle », confie le juge Soli, l’une de ses vieilles connaissances.

Dans son combat pour le droit, la présidente Bazeye n’est pas seule. De bonne source, l’avis négatif du 25 mai a été rendu à l’unanimité des sept conseillers de la Cour. Dans les semaines à venir, cette solidarité va être mise à rude épreuve. Le jour où la Cour sera saisie sur la légalité ou non du référendum constitutionnel, le pouvoir engagera un bras de fer. Méthodiquement, madame la présidente se prépare.

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