Dubaï s’enfonce, Riyad se relève

Alors que la bulle immobilière de la cité-État n’a pas fini d’imploser, le royaume wahhabite recueille les fruits de la politique d’austérité menée pendant cinq ans.

Publié le 2 juin 2009 Lecture : 3 minutes.

Une nouvelle version de la cigale et la fourmi se joue dans le golfe Persique. Cinq années durant, l’Émirat de Dubaï a surfé sur l’envolée des cours du pétrole, se hissant au rang de capitale mondiale des projets immobiliers les plus démesurés. Dans le même temps, le royaume d’Arabie saoudite a remboursé ses dettes, investi pour son développement et épargné le surplus. Dubaï a fait un mauvais pari sur l’avenir, Riyad a tiré les leçons du passé.

Ces trente dernières années, l’Arabie saoudite a plus souffert des chutes brutales du pétrole que bénéficié de ses envolées. Son économie a même touché le fond en 1998. L’invasion du Koweït par l’Irak avait suscité une forte hausse des cours, presque aussitôt retombée. Le baril a baissé jusqu’à 12 dollars, rapportant à peine 7 dollars à Riyad, qui a dû recourir massivement à l’emprunt. La dette a dépassé le PIB en 1999. Au moment où le pétrole est reparti à la hausse, en 2003, la Saudi Arabian Monetary Agency (Sama), la banque centrale, était fin prête. Ses équipes, rompues à la gestion des difficultés, complétées et formées pour y faire face, ont donné la priorité au remboursement de la dette, qui ne s’élève plus qu’à 13 % du PIB. La Sama a ensuite investi – 70 milliards de dollars en cinq ans pour augmenter la capacité de production de pétrole du pays, un pari concret sur l’avenir– et épargné, principalement en achetant des bons du Trésor américain, plus liquides et immédiatement disponibles en cas de besoin. Aujourd’hui, l’Arabie saoudite peut puiser dans ces réserves alors que le Koweït et Abou Dhabi cherchent désespérément à revendre les participations qu’ils avaient prises aux beaux jours dans des banques et des entreprises internationales dont la capitalisation boursière a fondu.

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Quand la crise financière s’est déclarée, l’économie de Dubaï a implosé. Les spéculateurs ont déserté. Les prix de l’immobilier, qui avaient grimpé de 400 % en cinq ans, ont chuté de 20 % à 40 % en quelques mois. Un tiers des surfaces construites sont inoccupées. Les derniers chantiers lancés sont interrompus ou reportés, notamment « The World », un archipel artificiel représentant la Terre, et Dubailand, un parc d’attractions qui devait être deux fois plus grand que Disney World, en Floride. Le Middle East Economic Digest estime le manque à gagner à 300 milliards de dollars.

Six nouvelles villes d’affaires

Riyad n’a pas été épargné par les conséquences de la débâcle financière. Mais les projets immobiliers du roi Abdallah sont maintenus. Lancés en 2005, ils portent sur la construction de six nouvelles villes d’affaires, dont la plus ambitieuse, Jizan Economic City, représente un investissement de 80 milliards de dollars sur trente ans. Il est vrai qu’ils sont majoritairement soutenus par l’investissement privé, pas par les finances publiques. Et les banques ont eu une approche très prudente en matière de prêts, évitant au secteur de connaître le même emballement que dans les pays voisins. Ce qui fait qu’aujourd’hui investisseurs et clients restent relativement épargnés par la tourmente.

Comme dans la fable, la cigale a cherché vers qui se tourner pour être secourue. Abou Dhabi, où se trouve le pouvoir politique des Émirats arabes unis, a emprunté 10 milliards, puis 20 milliards de dollars, pour renflouer les sociétés publiques à l’origine des mégaprojets et maintenir l’économie de Dubaï à flot. Quant à la fourmi, elle maintient son vaste programme d’investissements de 400 milliards de dollars pour les cinq années à venir. Beaucoup d’experts considèrent que le PIB de l’Arabie saoudite pourrait doubler dans les dix années qui viennent, pour atteindre 1 000 milliards de dollars. Voilà qui s’appelle recueillir les fruits d’une politique d’austérité.

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