Royaume-Uni : scandales à tous les étages

Profitant d’une faille du système réglementaire, parlementaires et ministres de toutes obédiences se sont, des années durant, fait rembourser des notes de frais sans rapport avec leurs fonctions.

Publié le 20 mai 2009 Lecture : 2 minutes.

Chef de file de la lutte contre la corruption au Kenya, John Githongo a récemment fustigé les hommes politiques de son pays dans un pamphlet intitulé C’est à notre tour de manger. Au Royaume-Uni, où il fut un temps exilé, les contribuables entonneront-ils bientôt un refrain du même genre : « Cessez de vous gaver sur notre dos » ?

Depuis plusieurs semaines, la presse britannique emmenée par le quotidien conservateur Daily Telegraph multiplie les révélations sur les pseudo-« notes de frais » des parlementaires. Des années durant, ces derniers ont en effet mis à profit une faille du système réglementaire pour se faire rembourser tout et n’importe quoi. Ainsi, ceux qui disposaient de deux logements, l’un dans leur circonscription et l’autre à Londres, percevaient une indemnité pour leur logement secondaire, tout en étant libres de décider où se trouvait leur résidence principale. L’indemnisation couvrait l’équipement et l’entretien « au sens large » dudit logement, un justificatif étant exigé au-delà de 25 livres. Chez les conservateurs comme chez les travaillistes, certains en ont abusé sans vergogne. Exemples.

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Andy Burnham, le ministre de la Culture, a réclamé trois fois le remboursement d’une facture de 16 000 livres pour la rénovation de sa maison (« Sans cela, je cours au divorce ! ») et a fini par obtenir gain de cause. Phil Hope, le secrétaire d’État aux Services sociaux, se serait fait rembourser quelque 37 000 livres consacrées à l’aménagement de son appartement londonien – casseroles comprises ! Figure du Parti conservateur, Oliver Letwin n’a pas hésité à faire financer par l’État la réparation d’une canalisation sous son court de tennis (coût : 2 000 livres). Même Jack Straw, le ministre de la Justice, a eu la mesquinerie de se faire rembourser un ouvre-boîtes d’une valeur de 6 livres, ainsi que deux lits (valeur non révélée). Plus grave, il a été contraint de rembourser la moitié de l’indemnité perçue pour sa taxe d’habitation : il avait indûment majoré le montant de celle-ci. « La comptabilité n’est pas mon fort », a-t-il plaidé…

Certains abus sont simplement risibles. Élue du pays de Galles, Cheryl Gillan a par exemple obtenu le remboursement de… deux boîtes de nourriture pour chien à 39 pence l’unité. Quant à Jacqui Smith, la ministre de l’Intérieur, elle aurait présenté la facture de la location par son mari de films pornographiques !

Et voilà que le Premier ministre, l’austère Gordon Brown, est à son tour mis en cause : entre 2004 et 2006, il aurait versé à son frère plus de 6 000 livres pour des frais de nettoyage. Sa défense vaut ce qu’elle vaut : l’un et l’autre utilisant les services du même prestataire, son frère réglait les factures et il lui reversait sa quote-part…

Reste qu’à leur tour les électeurs pourraient bien lui présenter la facture. Au plus bas dans les sondages, le Parti travailliste paraît résigné à une cuisante défaite aux élections européennes du mois de juin et ne se montre guère optimiste pour les législatives de l’an prochain. David Cameron, le chef de file des conservateurs, reste pourtant circonspect. Il n’est pas personnellement mis en cause, mais sait que nombre des siens le sont. « Nous devons tous reconnaître que nous sommes désolés pour ce qui s’est passé et que cela doit changer », s’est-il borné à déclarer. Mais la palme du ridicule revient sans conteste à Harriet Harman, numéro deux du Parti travailliste, qui a osé déclarer : « Dans notre système, le niveau de corruption est inférieur à celui de beaucoup d’autres pays. » Ah bon ?

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