Dans la ligne de mire

Chef des talibans locaux et proche d’Al-Qaïda, il est l’ennemi numéro un du régime. Et des Américains. Son nom : Baitullah Mehsud.

Publié le 20 mai 2009 Lecture : 3 minutes.

Alors que les talibans et les djihadistes d’Al-Qaïda unissent leurs forces en Afghanistan et au Pakistan, la stratégie de l’administration Obama se met en place. Pour le Pakistan, engagé depuis le 26 avril dans une offensive contre les talibans (voir J.A. n° 2522) : une aide économique et militaire accrue. Pour l’Afghanistan : des renforts (17 000 hommes) et un nouveau commandant, le général Stanley McChrystal, ancien chef des forces spéciales, à qui l’on doit la capture de Saddam Hussein et d’Abou Moussab al-Zarqaoui, l’émir d’Al-Qaïda en Irak.

Objectif : cibler l’adversaire et éviter que les populations, exaspérées par les bavures dont elles sont les victimes (encore 100 morts, le 11 mai, en Afghanistan), ne basculent dans le camp des extrémistes. L’Afghan Sirajuddin Haqqani et le Pakistanais Baitullah Mehsud, basés dans les zones tribales du Waziristan et commanditaires de la plupart des attentats perpétrés dans les deux pays, sont dans la ligne de mire. Depuis le 26 mars, le département d’État américain offre une récompense de 5 millions de dollars à quiconque permettra de les localiser.

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Le premier passe pour plus radical encore que son père, Jalaluddin, à qui il a succédé à la tête d’un clan réputé très proche d’Al-Qaïda. Quant à Baitullah Mehsud… « C’est un homme épouvantable, qui représente un grand danger pour le Pakistan et l’Afghanistan, même si ses menaces contre le territoire américain ne sont pas étayées », estime Richard Holbrooke, l’envoyé spécial des États-Unis dans la région. Le 5 avril, dans une interview à la BBC, le chef taliban avait en effet revendiqué l’attaque d’un centre pour immigrés à Binghamton (État de New York), qui avait fait 14 morts deux jours plus tôt, mais dont l’auteur – un Vietnamien sans emploi – n’a rien à voir avec son réseau. Il n’empêche : longtemps complexé par sa petite taille (1,55 mètre) et allergique à toute publicité, Baitullah Mehsud prend goût à sa macabre notoriété.

Né vers 1974 dans le nord-ouest du Pakistan, il n’a jamais fréquenté l’école publique, mais (un peu) une madrasa. Il aurait été, brièvement, professeur de gymnastique. Dans les années 1990, il combat aux côtés des talibans afghans, puis les aide à fuir lors de l’intervention américaine, à la fin de 2001. Son réseau, proche du mollah Omar, bénéficie, au même titre que d’autres mouvements extrémistes, de la complaisance des autorités pakistanaises.

Mais en juillet 2007, après l’assaut contre la Mosquée rouge, fief des intégristes à Islamabad, il déclare la guerre au régime du président Pervez Musharraf. En décembre, une quarantaine de chefs talibans le nomment à la tête du Tehrik-e-Taliban Pakistan (TTP). Il organise méthodiquement ses troupes (environ 10 000 hommes), déclare que « seul le djihad peut sauver la paix dans le monde » et multiplie les attentats : contre l’hôtel Marriott à Islamabad, contre un bus de militaires et un marché à Rawalpindi (26 morts), contre Benazir Bhutto, en décembre 2007, même s’il dément avoir été l’instigateur de son assassinat, car « tuer des femmes n’est pas dans [ses] coutumes ». Son dernier attentat, à Lahore, le 30 mars dernier (12 morts), inquiète les spécialistes, car il frappe le Pendjab, signe qu’il est parvenu à fédérer de nouveaux mouvements proches d’Al-Qaïda au-delà des fiefs talibans du Nord-Ouest.

Mais si le front du conflit s’élargit, l’étau se resserre autour de Baitullah Mehsud. Traqué par les drones américains et l’armée pakistanaise, il a prévenu les médias : s’il est tué en martyr, le djihad continuera.

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