Révélations sur l’affaire Kpatcha
Selon des sources internes à l’enquête que mène, depuis le 15 avril, le procureur Robert Bekaï, Kpatcha, le demi-frère du président Faure Gnassingbé, détenu à la prison civile de Lomé et interrogé au camp de la gendarmerie pour tentative de coup d’État, aurait reconnu être le propriétaire de la clé informatique USB saisie à son domicile et contenant une quinzaine de documents compromettants, aussitôt mis sous scellés par la justice.
Parmi ces pièces, dont J.A. s’est procuré copie, figurent notamment un plan de contrôle militaire de la capitale et une proclamation de prise du pouvoir par les forces armées. Cette dernière fustige « le désordre » et « la gabegie » qui, selon les présumés putschistes, régneraient sur un pays « sans autorité visible », devenu « une grande plaque tournante de la drogue ».
Profitant d’un voyage du chef de l’État en Chine, les mutins projetaient de mettre en place un « comité national de rectification et de réconciliation » dont la présidence aurait été confiée au commandant Abi Atti, 46 ans, ancien patron des forces spéciales de la gendarmerie (la Fosep). Le CNRR s’engageait à organiser rapidement des élections « crédibles et transparentes » auxquelles Kpatcha Gnassingbé, selon d’autres documents, avait l’intention d’être candidat. Entre-temps, ce dernier devait réoccuper son poste de ministre de la Défense, dont il avait été écarté en décembre 2007.
Parmi les fichiers figurant sur la clé USB se trouve d’ailleurs un projet de communiqué qui lui est attribué, dans lequel Kpatcha apporte son soutien à un coup d’État qu’il vient, dit-il, de « suivre avec une grande surprise mais avec beaucoup d’attention », avant de demander « à tous et à chacun d’éviter la chasse aux sorcières et les règlements de comptes ». Si l’on en croit un procès-verbal récapitulatif d’interrogatoires de la gendarmerie en date du 5 mai, dont J.A. a également obtenu copie, l’agent de liaison entre Kpatcha et les militaires n’était autre qu’Essolizam Gnassingbé, 30 ans, patron d’une société de communication et demi-frère, lui aussi, du président. Toujours selon ce PV, les aveux d’Essolizam auraient entraîné ceux d’Atti, puis de Kpatcha. Une trentaine de militaires et de civils ont été arrêtés dans le cadre de ce complot présumé.
Selon une source proche du chef de l’État, ce sont les services de renseignements de l’ambassade américaine à Lomé – auxquels Kpatcha aurait imprudemment confié son projet et auprès desquels il a ensuite tenté en vain de trouver refuge – qui, après avoir fait mine de l’encourager, ont prévenu Faure Gnassingbé de l’imminence du putsch « fratricide ». Dans sa déposition aux gendarmes chargés de l’enquête, le commandant Atti aurait été explicite à ce sujet : « Le ministre Kpatcha m’a dit qu’il a reçu l’ambassadeur des États-Unis chez lui et qu’il est soutenu par les Américains. Il m’a dit qu’il leur a soumis une liste des officiers pouvant assurer la transition et que j’ai été préféré par ces derniers, parce que je ne suis pas entaché du problème de trafic de drogue ou de violation des droits de l’homme. »
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