Au port d’Abidjan, cinq questions autour d’une concession

La décision d’accorder le TC2 au groupement emmené par APMT-Bolloré fait débat en Côte d’Ivoire.

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Publié le 29 avril 2013 Lecture : 3 minutes.

1) Quid de la mise en concurrence des terminaux ?

Le document de présélection stipulait que l’appel d’offres avait pour but « d’accroître la compétitivité du port par le jeu de la concurrence ». En donnant les clés du deuxième terminal à conteneurs (TC2) à APM Terminals (APMT) et Bolloré Africa Logistics (BAL), déjà présents sur le TC1, le Port autonome d’Abidjan semble au contraire renforcer le monopole existant de fait dans la manutention portuaire. « Si les volumes annoncés ne sont pas atteints, le port pourrait très bien devoir faire face à une hausse des tarifs de manutention », redoute un observateur. Au détriment de la compétitivité du port. Olivier de Noray, directeur des ports et terminaux chez BAL, écarte ce risque : « Les tarifs sont encadrés et régulièrement revus par les autorités portuaires. En Afrique, où le transport reste de manière générale assez onéreux, nous ne sommes pas plus chers que les autres, et chaque investissement réalisé fait baisser les tarifs portuaires », assure-t-il.

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2) APMT et BAL pouvaient-ils postuler ?

Selon la presse ivoirienne, le groupement APMT-BAL, en tant qu’opérateur du TC1, n’aurait pas dû être autorisé à participer sans avoir reçu l’aval de la commission de la concurrence de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). « Dans le cas d’un marché national, c’est à l’État de saisir l’autorité communautaire avant la mise en oeuvre de l’appel d’offres », précise un membre de la direction de la concurrence de l’UEMOA, qui ne semble pas avoir été contactée à ce sujet par les pouvoirs publics ivoiriens. Les autres soumissionnaires peuvent contester l’attribution du marché s’ils estiment qu’elle ne respecte pas les règles concurrentielles. Un recours auquel réfléchissent déjà les deux autres groupements en lice.

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3) Tout le monde a-t-il répondu au même appel d’offres ?

La question s’est posée au vu du montant de l’offre financière d’APMT-BAL. « Les 120 millions d’euros proposés comme ticket d’entrée et les 22 millions de redevance annuelle n’ont de sens que si les activités des deux terminaux sont cumulées », affirme un chargeur ivoirien. « Ils ont fait une proposition TC1 + TC2 quand les autres ont proposé un plan de développement du TC2 seul », confirme un concurrent. Chez BAL, on balaie ces accusations : « On nous dit qu’à Abidjan, le processus a changé en cours de route ; c’est faux. Il y a des organismes de contrôle, il suffit de les interroger. » Selon le cabinet de conseil auteur du rapport d’analyse, l’équilibre et la rentabilité financière du projet ne paraissent pas réellement assurés.

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4) Le renouvellement du TC1 est-il déjà entériné ?

Beaucoup le craignent. Justement à cause de l’offre APMT-BAL établie pour la durée de la concession sur les trafics additionnés des deux terminaux. Sachant que le contrat du TC2 démarre en 2016 et que celui du TC1 s’arrête en 2018, le chevauchement des activités ne durerait que deux ans, au lieu des vingt et un qui auraient servi de base de calcul au groupement retenu. De là à imaginer une reconduction tacite de la convention d’exploitation du TC1, il n’y a qu’un pas que beaucoup ont déjà franchi en Côte d’Ivoire.

5) Avec ou sans Maersk ?

Chaque soumissionnaire devait présenter les lettres d’engagement des compagnies maritimes soutenant leur projet. APMT-BAL en revendique sept, « dont celles de Maersk Line, de Nile Dutch, de Mitsui ou de Cosco », assure Olivier de Noray. Sauf que le courrier de Maersk, maison mère d’APMT, ne figurait pas dans le dossier remis lors de la phase de présélection, et qu’interrogé sur le sujet une fois les résultats connus, Maersk a refusé de s’engager sur Abidjan : « Cela dépendra de plusieurs facteurs. » C’est pourtant en s’appuyant sur l’armateur danois qu’APMT-BAL a pu promettre un trafic annuel de 450 000 conteneurs transbordés, contre 270 000 pour les autres offres.

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