Bouteflika III, acte 1

Confortablement réélu pour un troisième mandat, le président choisit de renouveler sa confiance à l’équipe gouvernementale sortante. Une décision qui a fait quelques déçus dans les rangs de ses partisans.

Publié le 19 mai 2009 Lecture : 3 minutes.

Il avait fait campagne en promettant la continuité, il a tenu parole. Une semaine après avoir prêté serment, le président Abdelaziz Bouteflika a reconduit, le 27 avril, Ahmed Ouyahia et l’ensemble de son équipe gouvernementale, hormis Bouguerra Soltani, président du Mouvement de la société pour la paix (MSP, ex-Hamas). L’ancien ministre d’État a dû céder son poste pour satisfaire une exigence de sa base militante.

Réélu sur la base du bilan de ses deux premiers mandats, soutenu par l’alliance de partis qui l’accompagne depuis son retour aux affaires, en 1999, le président n’a pas jugé utile d’imprimer une réorientation politique, renouvelant sa confiance aux ministres qui ont mis en œuvre son programme de soutien à la croissance. C’est avec la même équipe qu’il envisage donc de lancer le futur plan quinquennal (2010-2014) esquissé lors de sa campagne : mobilisation de 150 milliards de dollars dédiés à un vaste programme d’investissement dans les infrastructures et dans la construction de 1 million de logements avec, à la clé, la création de 3 millions d’emplois.

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Le maintien d’Ouyahia a provoqué une vive réaction de l’opposition. Le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD, de Saïd Sadi), ainsi que le Front des forces socialistes (FFS, de Hocine Aït Ahmed), deux partis qui ont boycotté le scrutin du 9 avril, y voient la confirmation de « l’immobilisme de l’Algérie de Bouteflika ». Quant aux partis ayant participé à la présidentielle, ils se remettent péniblement de leur déconvenue (moins de 10 % des suffrages pour les cinq candidats réunis). Ali Fawzi Rebaïne (Ahd 54) se mure dans le silence. Moussa Touati, du Front national algérien (FNA), et l’islamiste Djahid Younsi font face à une dissidence interne. Mohamed Saïd se consacre exclusivement à l’obtention de l’agrément pour sa formation politique : le Parti de la liberté et de la justice (PLJ). Louisa Hanoune, arrivée en deuxième position avec près de 5 % des suffrages, fait figure de leader de l’opposition. Elle s’est distinguée en boycottant, le 19 avril, la cérémonie de prestation de serment du président réélu et refuse toujours de commenter la reconduction de l’équipe Ouyahia, dont Chakib Khelil et Hamid Temmar, incarnation, à ses yeux, du « libéralisme à l’algérienne ».

Mais les déçus ne se recrutent pas uniquement dans les rangs de l’opposition. De nombreux partisans du président réélu ont estimé que leur dévouement durant la campagne méritait meilleure récompense. D’autres étaient persuadés que la victoire « éclatante » de leur champion lui donnait toute latitude pour « nettoyer les écuries d’Augias », entendre se débarrasser des ministres les moins performants. Mais les plus grands déçus parmi les partisans de Bouteflika sont les féministes. La révision de la Constitution du 12 novembre 2008 prévoyait une plus grande participation des femmes dans le processus de décision. Le président réélu en a fait un des axes de sa campagne. Mais l’espoir de voir plus de femmes admises en Conseil des ministres s’est très vite envolé.

Reconduit, Ouyahia fait preuve d’une remarquable discrétion, consacrant l’essentiel de son temps à la préparation du plan d’action qu’il soumettra dans les semaines à venir au Parlement. Plan d’action, et non déclaration de politique générale. Conséquence de la révision de la Constitution, le Premier ministre a perdu son statut de chef du gouvernement. Ouyahia n’est plus responsable devant les deux Chambres du Parlement, mais devant le chef de l’État. En attendant de tenir son premier Conseil des ministres, dès qu’Ouyahia aura achevé la rédaction de son plan d’action, Bouteflika a accompli ses premiers pas de président réélu. Il a promis d’être le « président du pouvoir d’achat » et a réaffirmé un engagement pris lors de son discours d’investiture : conforter la liberté de la presse. Ainsi a-t-il demandé à son gouvernement de préparer un nouveau code de l’information en vue de dépénaliser les délits de presse.

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