Sacrifices payants
Nouara Naghouche était en lice pour le Molière de la révélation théâtrale avec Sacrifices. Une pièce qui épingle aussi bien le machisme que la xénophobie.
Dès les premières minutes de Sacrifices, l’on sent bien à l’émotion et à la rage que dégage Nouara Naghouche (33 ans) qu’il y a beaucoup d’elle dans la pièce. « C’est le texte le plus autobiographique que j’aie jamais écrit », explique la comédienne. Je suis en fin de thérapie. Je soigne mes maux avec des mots », poursuit cette jeune femme qui a entamé sa carrière théâtrale, il y a dix ans, avec Nous avons tous la même histoire, son premier one-woman show.
Dans ce troisième spectacle, Nouara Naghouche croque avec talent une galerie de personnages inspirés par ses proches. Tous habitent les quartiers ouest de Colmar, là où celle qui se définit comme une pure AA (traduire Alsacienne Algérienne) a grandi. Zoubida, le plus attendrissant de ses personnages, n’est autre que sa propre mère.
Elle parle un français chantant et grammaticalement incorrect. Et passe ses journées enfermée à double tour à faire le ménage et la popote en écoutant en cachette Radio Nostalgie.
Rachid, son mari, un harki, est du genre à ne se réjouir que « des dons recueillis pour agrandir la mosquée ». Zoubida, elle, mariée à 14 ans, rêverait de l’entendre lui susurrer des mots doux comme ceux des chansons qu’elle écoute. Et pendant qu’elle rêve, les coups s’abattent sur elle. Après trente-cinq ans de vie commune, le cauchemar de Zoubida cesse. Elle est répudiée. Une nouvelle vie peut commencer.
Violence conjugale, machisme ordinaire… Nouara se fait « porte-parole de toutes ces femmes qui souffrent en silence ». Elle épingle aussi la xénophobie et les discriminations. Mais, hélas, Nouara Naghouche tombe elle-même dans le piège de l’humour raciste et n’évite pas les stéréotypes : « Vous connaissez la différence entre un Arabe et un athlète de triathlon ? Aucune : l’Arabe, il va à pied à la piscine, et il revient en vélo. »
Une belle incongruité dans cet émouvant spectacle qui a valu, néanmoins, à la prometteuse Nouara Naghouche d’être nommée à la 23e édition des Molières dans la catégorie « révélation théâtrale ».
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