Kif-kif ou non ?
L’interview accordée par le président de l’association homosexuelle Kif-kif, Samir Berkashi, au journal Assabah au début de mars a ouvert un débat virulent entre les tenants du conservatisme et les défenseurs des libertés individuelles. Le Parti de la justice et du développement (PJD, islamiste modéré) a immédiatement réagi par le biais de son journal Attajdid. Il a non seulement rappelé que l’homosexualité était une déviance réprouvée par la religion et un délit au regard de la loi, mais a aussi critiqué l’État pour son manque de fermeté sur ces questions de société. Pourtant, dès le 21 mars, le ministère de l’Intérieur publiait un communiqué on ne peut plus explicite : « Récemment, des voix se sont fait entendre dans les médias pour tenter de promouvoir une certaine forme de comportement honteux, provoquant ainsi l’opinion publique et ne tenant aucun compte des valeurs religieuses de notre société. »
À quelques mois des élections communales, l’État ne veut pas donner du grain à moudre à ceux qui font campagne contre la dépravation morale de la société marocaine. Cela n’a pas empêché de nombreux organes de presse de saluer le courage de Samir Berkashi et de soutenir sa cause au nom d’un Maroc « ouvert et tolérant ». Si l’éditorialiste du quotidien Aujourd’hui le Maroc reste prudent en abordant ce « sujet très chatouilleux », le journal TelQuel, lui, se montre beaucoup plus « militant ». L’hebdomadaire, dans lequel l’écrivain Abdellah Taïa a fait son coming out, appelle à abandonner une loi « hypocrite et inapplicable ». Samir Berkashi a en tout cas réussi son pari : remettre l’homosexualité au centre du débat public.
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