Kadhafi fait des siennes

Le « Guide » prend la parole sans y avoir été invité pour interpeller le roi Abdallah… et solder l’incident qui les avait opposés en 2003, au Caire.

Publié le 7 avril 2009 Lecture : 2 minutes.

Difficile d’imaginer un sommet régional auquel participe Mouammar Kadhafi sans incident. L’émir du Qatar Cheikh Hamad Ibn Khalifa Al Thani, hôte du sommet de la Ligue arabe des 30 et 31 mars, l’a vérifié à ses dépens. À peine avait-il achevé son discours inaugural, annonçant solennellement l’ouverture des travaux, que le « Guide » prenait, sans la demander, la parole : « Je voudrais dire quelques mots à mon frère Abdallah… » L’émir Hamad manque de s’étrangler : « Mon frère Mouammar, un point d’ordre… » Kadhafi fait mine de ne rien entendre et poursuit : « Cela fait six ans que tu m’évites, que tu me fuis et crains la confrontation. » Retour en arrière. En 2003, lors d’un sommet arabe au Caire, une intervention de Kadhafi, dans laquelle il fustigeait les Saoud, fut brutalement interrompue par le souverain saoudien, qui traita Kadhafi de fieffé menteur, lui promettant la géhenne dès la tombe. Les relations diplomatiques entre les deux pays furent rompues et, quelques mois plus tard, le New York Times publia une enquête sur une tentative d’assassinat du roi Abdallah dans laquelle serait impliquée la Libye. Retour à Doha en 2009.

Les tentatives du président de séance de faire taire Kadhafi sont vaines, et le « Guide » poursuit son interpellation du monarque saoudien. « Je veux te rassurer et te demander de ne pas avoir peur. C’est toi qui as le mensonge derrière et la tombe devant. Toi qui as été fabriqué par la Grande-Bretagne et protégé par les États-Unis d’Amérique. » L’émir du Qatar n’en peut plus, il coupe le micro de Kadhafi, mais la voix du « Guide » demeure audible : « Par respect pour la Oumma, je considère que le problème qui existe entre toi et moi est clos. Je suis prêt à te rendre visite et à t’inviter en Libye. » Ce vœu de réconciliation rassure Cheikh Hamad Ibn Khalifa, qui décide de laisser Kadhafi terminer son intervention. « Je suis un leader mondial, doyen des chefs d’État arabes, le roi des rois d’Afrique et imam des musulmans. Ma stature m’impose de ne pas me mettre à un niveau plus bas. » Kadhafi ferme son micro et l’émir du Qatar s’excuse de ne pas avoir compris plus tôt que le « Guide » voulait se réconcilier avec le roi Abdallah. Ce dernier est demeuré impassible. Quelques heures plus tard, les trois hommes se sont longuement rencontrés dans un salon du Centre de conférences. Une semaine s’est écoulée depuis cet incident et les relations entre les deux pays n’ont toujours pas été rétablies. Ce n’était sans doute pas l’objectif du « Guide ». Un objectif beaucoup plus terre à terre : faire parler de lui et satisfaire sa mégalomanie.

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