Vive la dépendance !
Après la frondeuse Réunion qui réclame vertement à la France plus d’attentions (et d’argent), deux autres îles de l’océan Indien sont sous les feux de l’actualité. Madagascar, d’abord, qui s’enlise dans sa crise institutionnelle et politique. La guerre des clones, un temps suspendue, a repris de plus belle. Les deux magnats des médias et (ex-)édiles de la capitale, Marc Ravalomanana et son tombeur Ange Rajoelina, multiplient les démonstrations de force (et de prétendue popularité) dans les rues d’Antananarivo. Marc rêve d’un grand retour après sa piteuse sortie (voir p. 16), Ange de conserver un pouvoir – qu’il ne s’attendait peut-être pas à conquérir aussi facilement – que la communauté internationale refuse de reconnaître. À raison, faut-il le rappeler : son accession à la présidence, le 17 mars, n’est rien d’autre qu’un coup d’État, phénomène très « tendance » en ce moment sur le continent. Et puisque le nouvel homme fort organise lui-même les élections censées mettre fin à la transition, comme en Mauritanie ou en Guinée, on ne peut que douter de leur validité et, donc, de la légitimité du futur élu. Sale temps pour la démocratie…
À 300 km à l’ouest de la Grande Île, Mayotte, quatrième membre de l’archipel des Comores, 374 km2 et 186 452 habitants. Le 29 mars, 95,2 % des Mahorais, qui culturellement, linguistiquement et historiquement sont comoriens, ont décidé de se jeter dans les bras de la France (voir p. 31). Mayotte deviendra donc département français en 2011. Un événement assez rare dans les annales de l’Histoire : un référendum organisé par une puissance coloniale, qui demande à sa colonie si elle souhaite être encore plus dépendante !
« Nous préférons la pauvreté dans la liberté à la richesse dans l’esclavage » : en août 1958, alors que le continent s’apprêtait à danser au rythme d’« Indépendance cha cha », le Guinéen Sékou Touré avait fait le choix de la liberté, envers et contre tout. Plus de cinquante ans après, Mayotte a préféré les euros et les passeports français, les portes de l’Europe qui s’ouvrent, le smic, le RMI (pardon, le RSA), les écoles et hôpitaux gratuits. Patriotisme, adhésion aux valeurs de la République et amour du drapeau tricolore n’entrent pas vraiment en ligne de compte. Les Mahorais n’ont juste pas envie de rejoindre un archipel des Comores pas franchement attrayant, malgré son indépendance… Fut un temps où nombre de voix se seraient élevées avec véhémence contre un tel choix. L’ONU, l’Union africaine et la Ligue arabe ont beau ne pas être d’accord ou considérer cette consultation comme « nulle et non avenue », il n’y a aucune chance d’assister à un retour en arrière. En face, c’est la France, il s’agit d’un référendum démocratique et le monde entier a d’autres chats à fouetter.
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