Le Gabon en ordre de bataille
Ancien officier des Royal Marines, Jim Dutton dirige l’Agence nationale des grands travaux depuis novembre. Un poste particulièrement stratégique.
La poignée de main ferme mais chaleureuse, son visage émacié adouci par un franc sourire, Jim Dutton, 59 ans, reçoit dans son vaste bureau de direction, au premier étage d’un immeuble flambant neuf. C’est là que ce lieutenant-général des Royal Marines – « qui ne sont pas des marins » précise-t-il – a établi son poste de commandement, désigné en novembre 2012 pour succéder à Henry Ohayon à la direction de l’Agence nationale des grands travaux (ANGT), structure interministérielle créée début 2010 pour organiser et mener à bien les « chantiers de l’émergence ».
C’est en treillis qu’il a découvert, en 1998, une Afrique tourmentée. À la tête d’un détachement de commandos, il était chargé de l’évacuation des résidents britanniques de la RD Congo en guerre. Ses missions l’amenèrent ensuite en Irak, puis en Afghanistan où il organisait encore la contre-insurrection il y a trois ans. Le Telegraph le décrivait à l’époque comme « un homme posé, réfléchi, sans rien du machisme bourru de certains officiers et qui ne badine pas avec la vie de ses hommes. Il était tout simplement calme, froidement professionnel dans son métier de combattant ».
Embauché
Quand l’heure de la retraite sonne en 2010, Bechtel, le leader américain du BTP, l’approche. « C’est un groupe qui a une structure très hiérarchisée et un fonctionnement proche de celui d’une armée, et qui a donc pris l’habitude de recruter beaucoup de vétérans familiers avec ces méthodes », explique la recrue, qui a troqué sans hésiter le battle-dress ocre pour un deux-pièces cravate.
La même année, le gouvernement gabonais signe un accord de partenariat avec Bechtel pour l’élaboration du Plan directeur national d’infrastructures et la mise en place de l’ANGT. Avant d’être mobilisé sur le terrain gabonais, Dutton s’est aguerri pendant quatre mois dans le Golfe, sur le chantier du port et de la zone industrielle Khalifa, une des plus vastes au monde. Après six autres mois à Londres passés à se plonger dans les dossiers gabonais, il est nommé directeur de programme de Bechtel à Libreville, puis prend la direction générale de l’ANGT en novembre 2012. Très rapidement, il marque ses différences avec son prédécesseur, Henry Ohayon : révision de certains projets, remise au pas des effectifs et réorganisation de l’agence, qui relooke au passage son identité visuelle.
2013 année charnière
« Pour plus d’efficacité et de transparence, nous avons procédé à une restructuration de nos activités en quatre sections bien distinctes : planification, projets du plan directeur, projets spéciaux et département commercial ». Cette rationalisation devrait permettre à l’ANGT d’atteindre sa vitesse de croisière en 2013, année cruciale comme le souligne Dutton : « Les chantiers de la Coupe d’Afrique des nations sont derrière nous et nous pouvons maintenant nous concentrer sur nos grands chantiers. »
Avec beaucoup de retard, la construction des logements sociaux a enfin débuté à Angondjé (lire p. 93) – le nouveau directeur général de l’Agence annonce que mille maisons y seront construites cette année -, et l’ANGT prévoit de multiplier les appels d’offres, comme celui lancé en décembre pour l’aménagement du Port-Môle, point de départ d’un ambitieux projet de valorisation du centre-ville : le « Champ triomphal ».
Autre mission stratégique pour Dutton, la « gabonisation » de l’agence, qui ne compte que quatre-vingt-quinze employés locaux sur deux cent quarante. Dutton est ainsi en train de faire modifier son adresse mail « @bechtel.com » en « @angt-gabon.com ». Tout un symbole.
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