Le Togo repart de l’avant

Avec le retour des bailleurs de fonds et des investisseurs étrangers, le pays relance sa machine économique dans un contexte difficile. Seuls le coton et les phosphates peinent à redécoller.

Publié le 1 avril 2009 Lecture : 4 minutes.

Le pays se porte mieux. Et veut le faire savoir. Avec une progression du PIB de 3 % en 2009 (1,5 % en 2007 ; 0,8 % en 2008), la croissance attendue pour cette année sera certes inférieure aux prévisions (3,8 %). Malgré cela, les signaux positifs se multiplient dans un pays qui sort à peine de la suspension de l’aide internationale, en vigueur depuis 1992. « Le Togo redémarre. Dans cinq ans, il redeviendra une référence dans la sous-région », estime Alain Tronche, le vice-président de l’américain ContourGlobal, qui construit une centrale thermique à Lomé. Car, comme le groupe énergétique, de nombreux investisseurs frappent à la porte. Sur l’immense table qui jouxte le bureau d’Adji Otèth Ayassor, le ministre de l’Économie et des Finances, s’empilent les demandes d’agréments des opérateurs privés désireux de s’implanter. « J’en signe des dizaines par semaine », assure-t-il.

Bien que les milieux d’affaires gardent les yeux rivés sur la présidentielle de 2010, la décrispation politique ayant suivi les législatives d’octobre 2007 a rétabli la confiance. Elle a surtout permis une reprise des concours extérieurs. Le Togo a signé en avril 2008 avec le FMI une Facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC). Cet accord triennal (2008-2010) de 108 millions de dollars s’ajoute à la reprise de l’aide européenne et de la BAD. « Les bonnes performances économiques se maintiennent malgré les effets de la crise mondiale », a justifié le 25 février dernier, Marshall Mills, du département Afrique du FMI, au terme d’une mission de deux semaines à Lomé.

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Éligible à l’Agoa, le pays bénéficie en outre de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE). Dans deux ans, une grande partie de sa dette extérieure, évaluée à 2,2 milliards de dollars, sera annulée et réaffectée aux secteurs sociaux. Ce n’est pas tout. Lors de la table ronde des bailleurs de fonds pour le Togo, à Bruxelles, en septembre 2008, le ministre de la Coopération, Gilbert Bawara, a reçu l’assurance d’un soutien de 600 milliards de F CFA. « Ce succès n’est pas tant le montant de l’aide, mais le fait que le Togo soit revenu sur la scène internationale, assure Gilbert Houngbo, le Premier ministre. Cela dit, beaucoup de chantiers ont démarré, notamment dans la lutte contre la corruption et le blanchiment. La réforme financière est lancée : nous avons trois ou quatre banques à réformer pour lesquelles nous recherchons des partenaires. Les discussions sont engagées. » 

Relancer l’investissement

Son gouvernement dispose d’une marge de manœuvre sans précédent pour relancer les investissements publics, qui ont chuté à 3 % du PIB aujourd’hui contre plus de 14 % en 1990. Depuis janvier, un plan stratégique prévoit la remise en état des ouvrages d’art, des routes et des pistes rurales. Déjà, 4 000 fonctionnaires ont été recrutés par concours. Les autorités travaillent également à rendre l’investissement plus attractif. « Avec cinquante-six jours pour créer une entreprise, nous étions mal notés, explique Guy Madjé Kudzo Lorenzo, ministre chargé du Secteur privé. Nous sommes à moins de dix jours et voulons atteindre soixante-douze heures en simplifiant les procédures. »

Ces derniers mois, les efforts ont surtout porté sur deux secteurs clés : l’énergie et le port de Lomé. Catastrophiques depuis 2006, les problèmes de délestage seront résolus en fin d’année après la construction, à Lomé, d’une centrale (100 MW). Alimentée en gaz nigérian depuis le gazoduc ouest-africain, elle satisfera la demande nationale. « La sécurité de l’approvisionnement est fondamentale pour les investisseurs. Nous voulions régler ce problème en priorité », se réjouit le ministre des Mines, de l’Eau et de l’Énergie, Noupokou Damipi. 

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Un nouveau terminal

Autre poumon, le Port autonome de Lomé (PAL), qui a traité 7 millions de tonnes de fret l’an dernier (6,2 millions en 2007). Le franco-espagnol Progosa construit actuellement un troisième quai. Le 15 décembre dernier, l’État a signé une convention pour trente-cinq ans avec la société Lome Container Terminal (LCT) pour la construction, à proximité, d’un nouveau terminal à conteneurs sur 50 hectares. Il doit confirmer la vocation de première plate-forme de transbordement du PAL en Afrique de l’Ouest. Dans deux ans, ce terminal gérera 400 000 à 500 000 EVP (250 000 aujourd’hui) et il vise 1,5 million pour 2012. Une seconde convention a attribué cette fois la gestion des conteneurs à Manuport (Getma). « Cet équipement permettra de fluidifier le fret vers l’hinterland, qui représente déjà 60 % du trafic », affirme David El Bez, le directeur de Manuport. L’entreprise opère déjà sur le PAL les navires de Mediterranean Shipping Company (MSC), second armateur mondial, qui veut faire de Lomé son « hub » en Afrique.

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Malgré tout, deux filières, vitales pour l’économie du pays, les phosphates et le coton, se portent mal. Victimes d’une mauvaise gestion et d’années de vaches maigres, elles ont placé les opérateurs dans le rouge et fragilisé le secteur bancaire. Avec 40 000 tonnes en 2008 (173 000 en 2004), la production cotonnière périclite. Fin 2008, 15 milliards de F CFA de dettes de la Société togolaise de coton (Sotoco) ont été épongés. L’entreprise doit s’ouvrir au privé. Comme la Société nouvelle des phosphates du Togo (SNPT), une activité dont la production a chuté de 40 % depuis 2004 pour tomber à 750 000 tonnes. « Dans toute réforme, il y a des résistances. Mais le FMI se déclare satisfait et estime que nous sommes en avance », conclut Gilbert Houngbo.

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