Orsenna se met à l’eau
Océans, mers, fleuves, rivières, glaciers, lacs et autres rus, sachez-le : comme le 8 mars est celle de la femme, le 22 mars est votre journée. C’est d’ailleurs pour cette raison que le 5e Forum mondial de l’eau, qui se tenait à Istanbul (Turquie), s’est clos le 22 mars. S’il est quelqu’un qui sera très attentif aux conclusions de cette grand-messe relative aux questions de pollution, d’assainissement ou de gestion des fleuves transfrontaliers, c’est bien l’académicien français Erik Orsenna.
Poursuivant son étude au long cours sur la mondialisation – il a commencé par s’intéresser au coton –, l’écrivain-économiste-navigateur a consacré son dernier ouvrage, L’Avenir de l’eau, à l’ensemble de ces questions, souvent vitales pour l’humanité. Et comme c’est un insatiable voyageur qui ne se contentera jamais d’une approche théorique, il a arpenté le monde entier pour poser ses (im)pertinentes questions à ceux qui ont pour mission de gérer les ressources hydriques, que ce soit pour abreuver les populations ou pour irriguer les cultures.
Bien sûr, il a visité cette Chine qui « dompte les fleuves » et s’est intéressé à la santé du lac Tchad comme aux maladies qu’en Inde l’eau peut véhiculer et répandre. Mais il s’est aussi rendu là où le partage des réserves est une question très délicate. Au Moyen-Orient, par exemple, où Palestiniens et Israéliens ne sont pas, loin de là, logés à la même enseigne sur un territoire où le précieux liquide est rare.
À Ramallah, l’ingénieur Fadel Ka’wash, qui représente l’Autorité palestinienne, explique ainsi à Orsenna comment Israël accapare plus des deux tiers de l’eau douce, en détournant le Jourdain et en puisant dans les nappes phréatiques. Et conclut sur cette note terrible : « Les piscines… Quand les Israéliens comprendront-ils que chaque piscine engendre cent terroristes ? » Le dialogue semble impossible. En face, au ministère israélien de l’Environnement, on répond : « La Cisjordanie est plus haute qu’Israël. Leurs eaux descendent vers nous. S’ils ne traitent pas leurs déchets, nous les recevons. Très, très désagréable. Et dangereux pour notre santé ! »
Sage, l’académicien se refuse à choisir un camp. Pour lui, Israël « accapare une grande partie de l’eau de la région, engendrant de ce fait des tensions et des ressentiments inexpiables » mais, par ailleurs, Israël l’économise « comme personne au monde », et ses recherches en matière de recyclage « donnent des raisons d’espérer aux cent pays arides de la planète ». En plus de 400 pages, de l’Australie à Singapour en passant par le Bangladesh, Erik Orsenna n’a pas asséché son sujet. Ceux qui n’ont pas étanché leur soif suivront son périple sur Internet (www.erik-orsenna.com).
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