Etranger chez soi
Après quarante ans de dur labeur en France, Mohammed voit arriver la retraite. Pour cet immigré à l’existence monotone, elle sonne comme un arrêt de mort. C’est un homme simple dont l’entourage n’a pas su reconnaître le courage. « Cette génération de Maghrébins arrivés en France dans les années 1960 n’a jamais parlé, explique Tahar Ben Jelloun. Beaucoup ont échoué à transmettre à leurs enfants leur culture et leur histoire. »
Mohammed n’a jamais voulu s’intégrer à « Lafrance ». Et ses enfants se moquent de lui lorsqu’il parle de « lentraite » au lieu de la retraite. Exilé dans sa propre famille, Mohammed n’est nulle part chez lui. « Dans Au pays, j’ai essayé d’imaginer ce qu’est devenu cet homme arrivé en France dans les années 1970. Ce sera mon dernier roman consacré à l’immigration », affirme le romancier, qui excelle à traduire la mélancolie et le malaise d’un personnage qui finit par sombrer dans la folie et le mysticisme. En refermant ce livre, le titre résonne comme une question lancinante : de quel pays est-on ? Peut-on retourner chez soi comme on en est parti ? Est-on toujours un étranger, malgré le temps qui passe ?
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