Le double message de Benoît XVI

C’était son premier voyage en Afrique, considérée comme une « terre d’espérance » en raison de sa jeunesse et du dynamisme de son catholicisme. Empêtré dans une crise déclenchée le 21 février par la réintégration de l’évêque négationniste britannique Richard Williamson, le pape Benoît XVI tenait là l’occasion de respirer une bouffée d’air frais, loin des critiques d’une opinion occidentale avec laquelle, décidément, il n’arrive pas à communier.

Publié le 30 mars 2009 Lecture : 2 minutes.

Ses propos sur le sida, tenus dans l’avion à destination de Yaoundé et rapportés plus ou moins fidèlement par la presse, ont suscité un nouveau tollé. « On ne peut vaincre ce problème du sida uniquement avec de l’argent, qui est nécessaire. S’il n’y a pas l’âme, si les Africains ne s’aident pas, on ne peut résoudre ce fléau en distribuant des préservatifs : au contraire, cela augmente le problème », a déclaré le souverain pontife.

Mais si la polémique enfle en Occident, elle est loin d’avoir entamé l’enthousiasme des chrétiens camerounais. « L’affluence n’avait pas été aussi importante lors des voyages de son prédécesseur », écrit Isabelle de Gaulmyn, du quotidien catholique français La Croix, qui avait couvert les visites de Jean-Paul II sur le continent.

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L’Afrique aurait-elle perdu sa capacité d’indignation ? Rien ne permet de l’affirmer. Elle a seulement d’autres priorités. Gangrenées par la corruption, désemparées devant une jeunesse nombreuse, sans emploi et en mal de repères, les sociétés africaines aspirent à un retour aux « valeurs structurantes du catholicisme ». Pour la population massée aux abords des routes, le rigorisme doctrinaire du « Panzerkardinal » Ratzinger ne paraît donc nullement suranné.

La pauvreté faisant le lit du sida en Afrique, Benoît XVI a choisi de s’attaquer à ses causes. En pointant la responsabilité des gouvernements locaux, des puissances étrangères et des multinationales qui « pillent les ressources naturelles et portent atteinte à l’environnement ».

Dans leur quotidien, les Africains semblent en effet essentiellement préoccupés par « la soif de pouvoir » dénoncée par le pape dans le document de travail remis aux évêques africains en vue du prochain synode d’octobre. Selon lui, elle exprime « le mépris d’une bonne gouvernance, manipule les différences politiques, ethniques, tribales et religieuses, et installe la culture du guerrier comme héros ». Et Benoît XVI d’admonester les hommes politiques du continent, qui ont perdu « le sens des principes démocratiques et élaborent des politiques clientélistes ethnocentristes, violant sans états d’âme les droits de l’homme ». Il tance, aussi, « l’égoïsme qui alimente la corruption et pousse au détournement de richesses destinées à des peuples entiers ».

Même si cette tournée a été entachée par ce qui n’est finalement qu’un rappel de la position du Vatican sur la question de la prévention du sida, elle n’aura pas été un voyage pour rien.

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