Mamane fait son show
L’humoriste nigérien remporte un vif succès avec sa chronique sur RFI et un spectacle haut en couleur qu’il présentera à Dakar, le 26 mars.
Depuis que Nicolas Sarkozy a fait sien le slogan de Philippe de Villiers, « la France, tu l’aimes ou tu la quittes », lorsque, ministre de l’Intérieur, il menait campagne pour la présidentielle de 2007, Mamane, 42 ans, accompagne toujours son tiéboudienne de… moutarde de Dijon. Et a troqué ses disques de zouglou et de ndombolo contre le dernier album de Carla Bruni.
Bleu de travail « RATP Propreté » sur le dos, « Mamane malmène les mots » au Lavoir moderne parisien. L’humoriste nigérien a décidé de s’installer en plein cœur de la Goutte d’or, le quartier africain de la capitale. « J’ai commencé à jouer devant un public blanc, bobo. Je voulais changer et présenter mon one-man show à de nouveaux spectateurs. J’avais envie que les Africains de Château-Rouge viennent me voir, mais aussi de faire découvrir ce quartier aux Parisiens qui ne s’y aventurent jamais… par peur. On n’a pas besoin de visa ni de vaccin pour venir ici ! »
Mamane est en passe de remporter son pari. Les représentations sont d’ores et déjà prolongées jusqu’en juin. D’ici là, il se produira également à Dakar, le 26 mars. L’opération est parrainée par RFI, qui offre les places à retirer au Centre culturel français.
Pendant une heure trente, le comique à la silhouette longiligne et à l’allure juvénile raille la France de Sarkozy. Il campe un balayeur sans titre de séjour et décrit dans un humour parfois grinçant, toujours corrosif mais jamais acerbe, la vie de sans-papiers avec son quotidien de petits boulots et de galères de logement. Une vie que Mamane a connue lorsqu’il était étudiant dans les années 1990.
Télé Congo
Troquant sa tenue de technicien de surface contre celle du présentateur du journal de Télé Congo, il égratigne l’Afrique des pères fondateurs, ces « excellences, présidents à vie, réélus dès le premier tour des élections qui n’ont pas encore eu lieu ». Une tâche qu’il prend à cœur. « L’humour doit être engagé, ancré dans la réalité. C’est la politique du désespoir. Pour monter sur scène, il faut de la colère. La mienne se nourrit de mon vécu, des injustices que je constate chaque jour… Je n’ai pas de limites. On peut rire de tout, mais jamais gratuitement. »
Une règle qu’il applique également dans sa chronique radio. Tous les matins à 6 h 57 en temps universel, sur RFI Afrique, il s’envole pour un pays africain imaginaire, la « République très très démocratique du Gondwana ».
Simple citoyen, journaliste à la radio Y’a foï (« tout va bien », en argot ivoirien), président-fondateur… ses personnages hauts en couleur commentent de manière décalée l’actualité continentale et internationale. Le résultat est « très très » drôle. Depuis le 19 janvier, sa chronique connaît un vif succès. « Je reçois plus d’une centaine de mails de félicitations et d’encouragements par semaine. Je réponds à tous. C’est important. »
Malgré la réussite, Mamane a su garder la tête froide. Et se rappelle ses débuts. « Je suis venu à la scène par hasard. Lorsque j’étais sans papiers, je fréquentais une association d’aide au logement qui proposait un atelier théâtre. C’est là que je suis monté pour la première fois sur les planches. Aujourd’hui, j’anime, à mon tour, un atelier à la maison d’arrêt de Saint-Étienne. Chaque année, pendant une semaine, je travaille avec un petit groupe de prisonniers. Il y a de vrais talents qui ne demandent qu’à éclore. Je suis prêt à les aider à se réinsérer. » Un humoriste à prendre au sérieux.
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