La polémique
Entre le Nord et le Sud, la cassure est nette. Tous les pays occidentaux approuvent la décision de la Cour pénale internationale (CPI) d’émettre un mandat d’arrêt contre El-Béchir. Tous les États africains et arabes la dénoncent. D’un côté, la lutte contre l’impunité. De l’autre, le combat contre l’ingérence. Dans le monde arabe, certains n’hésitent pas à attaquer la CPI sur son principe même. Plus nuancés, beaucoup de pays subsahariens s’interrogent sur cette justice qui ne poursuit « que » les criminels africains. Reste la grande question : les chefs d’État du continent répondent-ils à un réflexe de caste ou expriment-ils l’opinion de leurs peuples ? Qui l’emportera ? Desmond Tutu ou Mouammar Kadhafi ? Pour la CPI et son avenir, la réponse n’est pas sans conséquences.
Mandat d’arret contre Béchir: les réactions
Pour la décision de la CPI
SOUDAN
Abdel Wahid Mohammed Nour
Mouvement de libération du Soudan
« C’est une grande victoire pour les victimes du Darfour et du Soudan. »
Khalil Ibrahim
Mouvement pour la justice et l’égalité, signataire, le 16 février, d’un accord avec El-Béchir en vue de la paix au Darfour
« Je ne pense pas qu’il soit éthiquement possible de négocier avec quelqu’un qui a commis des crimes au Darfour et a perdu sa légitimité. »
Hassan el-Tourabi
Opposition islamiste
« On doit accepter la justice internationale, qu’elle soit contre nous ou pour nous. »
ÉTATS-UNIS
Hillary Clinton
Secrétaire d’État
« Si le président El-Béchir pense que l’accusation de la CPI est infondée, il peut la contester. Il aura l’occasion de se défendre au tribunal. »
FRANCE
Éric Chevallier
Porte-parole du ministère des Affaires étrangères
« Nous rappelons notre soutien à la justice pénale internationale. […] Il ne saurait y avoir d’autre solution que politique à la crise du Darfour ».
AFRIQUE DU SUD
MGR Desmond Tutu
Prix Nobel de la paix
« L’occasion est historique. Les dirigeants africains devraient la saisir au lieu de l’escamoter. »
AMNESTY INTERNATIONAL
Irene Khan
Secrétaire générale
« C’est un signal fort, à la fois pour le Darfour et pour le reste du monde : ceux qui violent les droits de l’homme seront traduits en justice, aussi puissants soient-ils. »
Contre la décision de la CPI
CHINE
Qin Gang
Porte-parole du ministère des Affaires étrangères
« La Chine s’oppose à tout acte qui pourrait perturber la situation pacifique globale du Darfour et du Soudan. »
RUSSIE
Ministère des Affaires étrangères
« Omar el-Béchir bénéficie d’une immunité de chef d’État en vertu du droit international. »
UNION AFRICAINE
Jean Ping
Président de la Commission
« La justice internationale ne semble appliquer les règles de la lutte contre l’impunité qu’en Afrique, comme si rien ne se passait ailleurs, en Irak, à Gaza, en Colombie ou dans le Caucase. »
LIGUE ARABE
Amr Moussa
Secrétaire général
« Nous sommes solidaires du président Omar el-Béchir. […] C’est un développement grave, qui n’a pas tenu compte de l’immunité des chefs d’État qui figure dans la Convention de Vienne de 1961. »
LIBYE
Mouammar Kadhafi
« Guide » de la Jamahiriya
« Le mandat d’arrêt constitue un grave précédent contre l’indépendance des petits États, leur souveraineté et leurs choix politiques. »
ALGÉRIE
Mourad Medelci
Ministre des Affaires étrangères
« Nous rejetons catégoriquement la politique du deux poids deux mesures, et soutenons la campagne internationale visant à faire annuler la décision de la CPI. »
Louisa Hanoune
Parti des travailleurs – opposition
« Le complot qui se trame au Soudan n’est que le prélude à de futures ingérences dans d’autres pays arabes et musulmans. »
TURQUIE
Ali Babacan
Ministre des Affaires étrangères
« Le gouvernement soudanais a ses défauts, mais on ne pourra aboutir à une solution au Soudan qu’en coopérant avec lui et en le soutenant. »
VENEZUELA
Reinaldo Bolívar
Secrétaire d’État aux Affaires africaines
« Les institutions judiciaires ne doivent pas être politisées. »
EN NUANCES
OUGANDA
Yoweri Museveni
Chef de l’État
« Nous devons attendre le résultat de l’enquête de l’Union africaine, conduite par Thabo Mbeki, avant de condamner El-Béchir et ce qu’il est censé avoir fait. »
ÉTATS-UNIS
Russell Feingold
Président de la sous-commission du Sénat pour les Affaires africaines
« Si des progrès importants contribuaient à mettre fin à la violence sur le terrain, on pourrait alors envisager une suspension [du mandat d’arrêt].»
ARGENTINE
Julio César Strassera
Ancien procureur au procès de la junte argentine
« Ce mandat d’arrêt constitue un progrès. Je serais curieux de savoir si la même chose pourrait arriver au président des États-Unis ou de la Russie. »
ONU
Aucune déclaration officielle.
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Mandat d’arret contre Béchir: les réactions
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