Paradoxe marocain
Depuis une dizaine d’années, le septième art occupe une place centrale dans le paysage culturel marocain. La production cinématographique nationale, qui s’élève à une quinzaine de films par an – comme la Belgique ou la Suisse – a gagné en qualité. En 2008, comme les années précédentes, les films marocains se sont classés en tête du box-office. Le pays, qui organise le Festival international de Marrakech, accueille aussi chaque année des dizaines de tournages internationaux.
Mais, dans le même temps, les salles de cinéma ferment les unes après les autres. Entre 1995 et 2007, le nombre d’entrées est passé de 15 millions à 4 millions par an et le royaume ne compte plus que 94 écrans, contre 300 dans les années 1980, selon les statistiques du Centre cinématographique marocain (CCM). Une hécatombe qui s’explique en partie par la concurrence des DVD piratés et de la télévision satellitaire, que reçoivent 10 millions de Marocains. Mais les exploitants ont aussi leur part de responsabilité : incapables de s’adapter aux nouvelles normes technologiques, ils ont laissé leurs salles se délabrer et ont manqué d’originalité dans leur programmation.
Programme ambitieux
Selon Noureddine Saïl, directeur du CCM, « les salles sont la condition sine qua non pour créer un marché national et faire exister le cinéma marocain ». Il a donc lancé un programme ambitieux pour créer jusqu’à deux cents écrans à l’horizon 2012. Il mise, outre sur les salles de quartier, sur les multiplexes, qui proposent une offre diversifiée et sont plus rentables pour les investisseurs. Grâce à des incitations fiscales et à des avantages, notamment dans l’obtention des crédits, le CCM espère que de nombreux investisseurs privés tenteront l’aventure. Dès octobre 2009, le Colisée de Rabat deviendra un multiplexe de cinq salles, et un autre complexe cinématographique devrait ouvrir cette année à Agadir. Noureddine Saïl compte aussi sur les exploitants pour pratiquer des prix plus attractifs, avec un billet autour de 15-20 dirhams (1,37-1,82 euro).
Mais, pour un exploitant, « cette politique est insuffisante et ne peut concerner que les grands centres urbains », alors que les petites villes sont les plus touchées par les fermetures. Beaucoup doutent par ailleurs de la rentabilité des multiplexes. En marge du 10e Festival du film marocain en décembre 2008, le patron du Megarama de Casablanca – premier multiplexe du continent – et de celui de Marrakech, Jean-Pierre Lemoine, a reconnu que les 600 000 entrées annuelles de son cinéma n’étaient pas suffisantes pour assurer sa rentabilité.
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