Tigres en cage
Traqués par l’armée, les rebelles tamouls du LTTE sont désormais confinés dans quelques arpents de jungle. La guerre civile sri lankaise est sans doute entrée dans sa dernière phase après la prise par l’armée gouvernementale des principales villes tenues par les séparatistes du LTTE (Tigres de libération de l’Eelam tamoul), le raid lancé sur Colombo, la capitale, le 20 février, par deux avions rebelles (qui ont été abattus) n’étant guère qu’un baroud d’honneur.
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Depuis les années 1980, le conflit oppose la majorité cinghalaise de confession bouddhiste (71 % de la population) à la minorité tamoule et hindouiste (18 %). Les Tigres, qui, il y a deux ans, contrôlaient quelque 18 000 km2 dans le nord et le nord-est de l’île, se terrent aujourd’hui dans la jungle et ont dû se résoudre à demander un cessez-le-feu. Mais le gouvernement exige au préalable qu’ils déposent les armes. Quatre questions pour mieux comprendre.
1. Qui sont les tigres tamouls ?
Le mouvement est né en 1972 en réaction à la politique discriminatoire menée par la majorité cinghalaise au pouvoir depuis l’indépendance, en 1948. Il est dirigé d’une main de fer par son fondateur, Velupillai Prabhakaran, 54 ans, qui a transformé ce mouvement de jeunesse en une véritable guérilla. À ses plus beaux jours, le LTTE comptait entre 10 000 et 15 000 hommes et faisait régner la terreur avec ses commandos suicides. Son objectif est la création d’un État indépendant sur un tiers du territoire.
2. Comment expliquer leur déroute ?
Entre 2002 et 2006, la guerre civile a connu une longue période d’accalmie, suite à la signature d’un cessez-le-feu sous l’égide de la Norvège. Des pourparlers de paix se sont engagés, mais tout a été remis en cause par l’arrivée au pouvoir, fin 2005, de Mahinda Rajapakse, qui, allié à des partis extrémistes cinghalais, s’est engagé à éradiquer l’insurrection. Il s’est empressé d’augmenter de 20 % le budget des forces armées et de se rapprocher du Pakistan et de la Chine, ses principaux fournisseurs d’armes. À l’automne 2008, l’armée a déclenché une offensive de grande ampleur, qui porte aujourd’hui ses fruits. Le ralliement au gouvernement, il y a quelques années, du colonel Karuna, un proche de Prabhakaran, a aussi joué un rôle. De même que l’inscription par les États-Unis et l’Union européenne du LTTE sur la liste des organisations terroristes – ce qui a compliqué la recherche de financements dans la diaspora.
3. une paix durable est-elle possible ?
Privé de ses capacités militaires, le LTTE risque de renouer avec la guérilla urbaine. Le gouvernement n’est pas disposé à céder aux revendications tamoules et considère l’insurrection comme un simple problème de maintien de l’ordre. Sans un véritable partage de pouvoir dans le Nord, une paix durable est difficilement envisageable.
4. Quel est le bilan de la guerre civile ?
Au moins 70 000 morts et plusieurs dizaines de milliers d’exilés. Depuis le début de l’année, entre 100 000 et 200 000 personnes sont prises au piège dans une enclave de 40 km2 où se déroulent de furieux combats. Les ONG accusent l’armée de bombarder les civils et le LTTE de les utiliser comme bouclier humain.
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