Le pari de David Chow

Un investisseur chinois, spécialiste du marketing des casinos, nourrit l’ambition de lancer un « mégaprojet touristique, récréatif et immobilier ».

Publié le 10 mars 2009 Lecture : 3 minutes.

Les investisseurs du Golfe, dont les mégaprojets font rêver les Tunisiens, ont fait un émule. David Chow, célèbre tycoon chinois de l’industrie des loisirs, a été reçu, le 23 février, par le président Zine el-Abidine Ben Ali, à qui il a confirmé son intention de lancer dans le pays un « mégaprojet touristique, récréatif et immobilier ». Il y a un an, Chow avait été reçu à Tunis par le Premier ministre Mohamed Ghannouchi, qui lui avait parlé des opportunités d’investissements et des avantages incitatifs dans le secteur du tourisme. À l’époque, il était intéressé par deux sites : l’île de Djerba et Tozeur (dans le Chott el-Djerid). Depuis, il a reporté son choix sur la région d’El-Haouaria, à la pointe du cap Bon, dans le nord-est du pays. Selon nos informations, le projet devrait s’étendre sur une superficie de 2 000 hectares, couvrant le site de Zougag, connu pour sa forêt de pins d’Alep avec une plage de sable fin qui compte parmi les plus belles de Tunisie. Aucun contrat n’a encore été signé, mais le fait que Chow ait réussi à obtenir une audience du chef de l’État est le signe que le projet est entré dans une phase de préconcrétisation.

De Las Vegas à Macao

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Qui est Chow Kam Fai, alias David Chow ? Cet homme à l’allure féline se définit comme l’un des rares spécialistes du marketing des casinos. Il a opéré à Las Vegas, aux Philippines, en Corée du Sud, en Grande-Bretagne et à Macao, où il gère deux casinos (Landmark Plaza et Pharaon), et, depuis 2006, en partenariat avec Stanley Ho, le roi chinois du « gambling », le Quai du Pêcheur, un parc à thème régional dont le coût est estimé à 1 milliard de dollars. Chow a investi 250 millions de dollars dans la construction, à Pékin, du Legendale Hotel, dont les premiers clients ont été les délégations de 56 pays et 22 chefs d’État lors des jeux Olympiques de 2008. Chow est né en 1950 dans une famille aisée de Hong Kong (alors sous administration britannique). Dans les années 1970, il émigre aux États-Unis, se lance dans le business des casinos à Las Vegas et devient l’un des « rabatteurs » les plus habiles – et les plus demandés – de joueurs fortunés venus des quatre coins du monde. Après onze années d’expérience américaine dans le marketing des établissements de jeux, on le retrouve en Asie comme opérateur spécialisé dans l’escorte des gros joueurs vers ses employeurs de Las Vegas. Il s’installe à Macao, qui est encore, pour très peu de temps, sous domination portugaise, et y fonde l’Association pour la promotion et le développement de Macao (Aprode). En 1996, il est élu député au Parlement local. Après la rétrocession, en 1999, de Macao à la Chine, qui lui accorde un statut semblable à celui de Hong Kong, avec une large autonomie politique et économique, Chow est réélu deux fois, en 2001 et en 2006. Rien d’étonnant à cela : à Macao, la plupart des patrons d’établissements de jeux sont des parlementaires. Ce sont eux qui ont contribué à faire de l’ex-possession portugaise le seul endroit en Chine où on trouve des casinos. Qui plus est, le chiffre d’affaires de ces derniers est plus élevé qu’à Las Vegas. Entre 2002 et 2007, le secteur a crû de 20 % en moyenne par an, avec un chiffre d’affaires record de 13,7 milliards de dollars en 2008 (+ 31 % par rapport à 2007).

« Pôle régional »

Les ambitions de Chow ne se limitent pas à la Chine, où il prévoit cependant de construire cinq hôtels supplémentaires. Ces deux dernières années, il a prospecté le Cap-Vert, le Vietnam, la Hongrie, en vue d’y lancer des projets dans l’industrie du tourisme et des casinos. Pourquoi le choix de la Tunisie ? Pour l’heure, Chow s’est cantonné à des généralités, déclarant que « la Tunisie est en mesure de jouer un rôle de pôle régional pour la promotion des activités touristiques et commerciales compte tenu de sa position géographique, du climat de sécurité et de stabilité qui y règne et des traditions d’hospitalité qui la caractérisent ». À deux heures de vol des principales capitales européennes, la Tunisie accueille plus de sept millions de touristes par an et fait figure de destination idéale pour les amateurs de jeu et de loisirs familiaux. La volonté affichée des groupes du Golfe d’y investir massivement a sans doute contribué à renforcer l’image de marque du pays. Selon l’agence britannique Marr International, la Tunisie est, avec Dubaï et l’Égypte, l’un des trois premiers sites d’investissement immobilier en Afrique et au Moyen-Orient pour 2009. La Tunisie permettrait ainsi à David Chow de diversifier ses placements, d’autant qu’il peine à obtenir de Pékin une nouvelle licence pour ouvrir un autre casino à Macao. On en saura plus lorsque ce joueur émérite de poker décidera d’abattre ses cartes… à la dernière minute.

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