Femmes d’influence

Brillantes en classe et à l’université, elles s’imposent de plus en plus dans les milieux économiques et culturels. Quant aux trop rares élues, lorsqu’elles entrent en politique, ce n’est pas pour faire tapisserie.

Publié le 24 février 2009 Lecture : 7 minutes.

Issu du dossier

1999-2009: Les années Bouteflika

Sommaire

SAÏDA BRAHIM BOUNEB

Maire de Kouba

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A l’écoute des citoyens

Ni les insultes ni les agressions auxquelles elle a dû faire face à l’approche du scrutin n’ont eu raison de la volonté de Saïda Brahim Bouneb de briguer un mandat électoral.

Psychologue de formation, cadre supérieur au ministère de l’Emploi et de la Solidarité nationale, mais aussi « psy » attitrée de l’émission télévisée Koul Chai Moumkin (« Tout est possible », remake de Perdu de vue), Saïda Bouneb savait que le pari était difficile lorsqu’elle s’est présentée comme tête de liste du Front de libération nationale (FLN, au pouvoir) aux élections municipales du 29 novembre 2007.

Elle a choisi le parti du FLN en fille de révolutionnaires, « tout simplement parce que mon père est moudjahid et ma mère fille de chahid [martyr] », explique-t-elle, et cela faisait déjà plus d’un an qu’elle était responsable de la kasma (section) de Kouba, la circonscription où elle s’est présentée et elle a passé quarante ans, quasiment toute sa vie. Mais la plus grande commune de la capitale a la réputation d’être un fief islamiste : c’est dans ce quartier populaire des hauteurs d’Alger qu’Ali Benhadj, leader islamiste, attirait des milliers de fidèles lors des prêches qu’il animait au début des années 1990. N’empêche, Saïda Brahim Bouneb a été élue haut la main.

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Très à l’écoute des citoyens – c’est ce que disent ses administrés –, elle œuvre à faire de Kouba une commune où il fait bon vivre. Et de sa mairie un modèle de gestion et de bonne gouvernance.

LOUIZA AMMI

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Photographe de presse

Objectif Algérie

Il n’y a sans doute pas un bout de l’âme algérienne qui n’ait été saisi par l’objectif de Louiza tant elle a promené sa frêle silhouette aux quatre coins du pays. Elle a plongé dans l’univers de la photographie grâce à son frère, revenu des États-Unis avec un appareil photo. Depuis, elle vit l’objectif chevillé au corps. Et avoue que la photographie est aussi indispensable pour elle que l’air ­qu’elle respire.

Chef du service photo au quotidien Liberté, à 36 ans, cette boule d’énergie est déjà un vétéran parmi les femmes reporters-photographes officiant dans la presse algérienne. « Au début des années 1990, se souvient-elle, nous n’étions que deux ou trois. Faire travailler des femmes dans les labos était presque mal vu. Aujourd’hui, la profession s’est largement féminisée. »

La frêle Louiza a couvert les massacres et les tueries durant la décennie sanglante, notamment à Ramka et Had Chekala, en 1997. Un documentaire de la chaîne française Canal+ l’a alors suivie en reportage. En larmes. Révoltée. Sans jamais lâcher son objectif. Émouvante.

Son souhait ? Organiser des expositions à travers le monde pour montrer les visages multiples de son pays.

LEÏLA HADJ ARAB

Députée

Une parlementaire de terrain

Avocate des démunis et des laissés-pour-compte, elle comptait parmi ses clients les victimes des événements de Kabylie, qui ont fait 126 morts au printemps 2001. « Le militantisme me coule dans les veines », explique-t-elle. Et, lorsque le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) lui propose de se porter candidate à la députation, en mai 2007, dans la circonscription de Tizi-Ouzou, elle n’hésite pas une seconde.

Seule femme parmi les 19 députés que compte son parti – elles ne sont que 30 dans tout l’Hémicycle, sur 389 élus –, Leïla Hadj Arab n’est pas du genre à se morfondre sur son siège. Membre de la commission Santé et Affaires sociales, elle est connue pour être une femme de terrain et réputée pour son franc-parler. « Elle est l’un des rares députés de l’Assemblée à prendre régulièrement la parole pour interpeller les membres du gouvernement », dit d’elle un collègue.

AHLEM MOSTEGHANEMI

Poète et romancière

La plus lue du monde arabe

« Elle s’est imposée comme l’une des voix les plus importantes du roman arabe », disait d’elle le réalisateur égyptien Youssef Chahine. À 55 ans, cette Constantinoise née à Tunis, qui vit à Beyrouth depuis 1994, est en effet l’auteure la plus lue dans le monde arabe et la première algérienne à écrire en arabe dont les romans ont été traduits en anglais. C’est son père, Mohamed Cherif, ancien militant du PPA (Parti du peuple algérien) et haut fonctionnaire, qui lui donna le goût de la poésie et des auteurs classiques. À 18 ans, Ahlem anime déjà une émission de radio à succès, Hamassat (« Littérature et mélodie »), et publie quelques articles. Quelques années plus tard, en 1976, elle obtient une licence de lettres arabes à la faculté d’Alger puis, en 1982, un doctorat en sciences sociales du Maghreb à la Sorbonne (couronné par une thèse intitulée « Algérie, femmes et écriture »).

Mariée à un homme de médias libanais sympathisant de la lutte algérienne et journaliste, Ahlem passe à l’écriture de romans, dont la trilogie Mémoires de la chair (Dhakirat al-djassad, 1993), Le Chaos des sens (Fawdha al-hawas, 1997) et Passager du lit (Aber Sarir, 2003). Mémoires de la chair lui a valu le prix Naguib-Mahfouz, l’équivalent du Goncourt arabe, et le prix Nour de la meilleure œuvre féminine en langue arabe. Depuis juin 2008, elle est ambassadrice de bonne volonté des Nations unies.

RYM OTHMANI

Directrice générale de MMC-DDB

Une affaire de communication

Cette diplômée de l’université de Paris-Dauphine aurait pu faire carrière en France ou en Tunisie, son pays d’origine. Avec un mari entrepreneur – il est le patron de la Nouvelle Conserverie algérienne de Rouiba (NCA) –, elle aurait aussi pu se contenter de rester à la maison ou de faire du shopping. C’est bien mal la connaître…

À 46 ans, mère d’une adolescente de 16 ans, Rym Othmani n’a jamais joué les femmes au foyer. Dès le début des années 1990, elle décide de rentrer en Algérie avec son époux, Slim, et, en 1996, alors que le pays est au plus mal, elle fonde une agence de publicité et de conseil en communication : MMC. Treize ans plus tard, le groupe, partenaire de DDB (le numéro deux mondial du secteur), est établi à Alger et à Tunis. Il compte dans son portefeuille clients les plus gros annonceurs du marché. « En Algérie, explique Rym Othmani, le marché de la pub pèse 100 millions d’euros. Mais il faut jouer des coudes pour avoir sa part du gâteau. » Et d’ajouter : « La communication est un univers très masculin. Il faut se battre comme deux hommes pour pouvoir exister. »

MAÏSSA BEY

Ecrivaine

L’ultime rempart des mots

C ontrairement à bon nombre de ses compatriotes romanciers, elle a décidé de ne pas quitter son pays, notamment pour mieux témoigner du sort des femmes, une cause qui lui tient à cœur. Samia Benameur, alias Maïssa Bey de son nom de plume, est une écorchée vive. « À tous ceux, dit-elle, qui me demandent pourquoi j’écris, je réponds qu’aujourd’hui je n’ai plus le choix, parce que l’écriture est mon ultime rempart. Elle me sauve de la déraison et c’est en cela que je peux parler de l’écriture comme d’une nécessité vitale. »

Après avoir suivi des études universitaires de lettres à Alger, Maïssa Bey enseigne le français à Sidi Bel-Abbès (à 80 km au sud-ouest d’Oran), où elle réside encore aujourd’hui, et préside l’association Paroles et écritures.

Elle publie son premier roman en 1996, Au commencement était la mer. De romans en nouvelles et en pièces de théâtre, Maïssa Bey a, depuis, décroché de nombreux prix littéraires, en Algérie et dans le monde francophone. Le dernier ? Pas plus tard qu’en novembre 2008 pour Pierre, sang, papier ou cendre, qui a reçu le Grand Prix du roman francophone au Salon international du livre d’Alger (Sila).

YASMINE CHOUIKH

Réalisatrice

Voyage en famille, du court- au long-métrage

Tombée dans le chaudron à sa naissance – son père, Mohamed, et sa mère, Yamina, sont tous deux réalisateurs –, elle a suivi les traces de ses parents. « À la maison, dit-elle, on parlait cinéma du lever au coucher du soleil. » En 1988, la petite Yasmine jouait l’actrice dans l’un des plus célèbres films de son père, La Citadelle. Depuis, elle est passée de l’autre côté de la caméra.

Après des études de psychologie à l’université de Bouzaréah – « il en faut pour réussir dans ce métier » précise-t-elle –, elle se lance donc elle aussi dans l’aventure cinématographique. En 2007, son premier court-métrage, El Bab (« La Porte »), a été sélectionné dans de nombreux festivals en Afrique, en Europe et en Asie. En huit minutes, elle y évoque les conditions de vie d’une femme algérienne, Samia, qui rêve de quitter un jour sa maison pour se libérer du joug familial et toucher du doigt la liberté.

À 26 ans, présentatrice d’une émission sur Canal Algérie et directrice artistique du Festival du court-métrage de Taghit, Yasmine Chouikh fait partie de la nouvelle vague de réalisateurs algériens (voir pp. 82-83) et est persuadée que, « avec un peu de moyens, on pourra faire des merveilles ». Elle travaille actuellement sur son premier long-métrage, Le Fils des djinns, produit par sa sœur, Amel.

FELLA ABABSA

Chanteuse

Diva à l’oriental

C’est d’abord une voix et un physique, dont la plastique avantageuse fait partie du spectacle, à la scène comme à la ville. Ronde et pulpeuse, Fella Ababsa fait fantasmer des milliers de fans.

Fille du célèbre barde de la chanson bédouine, Abdelhamid Ababsa, Fella a hérité de son père la voix chaude et suave. Aussi adulée dans les autres pays du monde arabe qu’en Algérie, elle remplit les salles partout où elle se produit.

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