Un Français chargé comme une « mule »

En mission commandée pour le compte des douanes françaises, un ex-bijoutier de Montauban écope de cinq ans de prison ferme pour trafic de drogue.

Publié le 24 février 2009 Lecture : 2 minutes.

« Je suis consterné et amer. » Au lendemain de la condamnation de Serge Astorc par le tribunal de Tanger, son avocat, Me Jean-Lou Lévi, exprime haut et fort sa déception. Car, pour l’homme de loi, l’enjeu était clair : il s’agissait d’obtenir rien de moins que l’acquittement. Mais les magistrats marocains ne l’ont pas suivi. Le 17 février, à l’issue d’une audience expédiée en deux heures, ils ont infligé cinq ans de prison ferme et une amende douanière équivalant à 1,2 million d’euros à Serge Astorc, un Français de 54 ans, interpellé à Tanger en décembre 2007 avec 400 kg de haschisch cachés dans sa Peugeot 806.

Depuis, du fond de sa cellule, l’ancien bijoutier de Montauban clame son innocence. Sa thèse, confirmée par une commission rogatoire internationale, semble pourtant limpide : moyennant finances (le dossier évoque la somme de 12 000 euros), il aurait accepté de servir de passeur pour le compte des douanes françaises. But de l’opération : remonter une filière de trafiquants opérant entre le Maroc et le sud-est de la France. Les preuves de cette opération de « livraison assistée », dans le jargon des douanes, semblent solides : son véhicule était équipé d’un mouchard électronique et l’implication des autorités françaises (douanes et SRPJ de Montpellier, sous l’autorité du parquet) a été officiellement reconnue. Pourquoi alors condamner cette « mule », ce simple passeur, agissant pour le compte de la police judiciaire française ? Selon Me Lévi, « il s’agit d’un avertissement à l’adresse de la France et j’espère qu’il va porter. Les autorités marocaines n’étant pas associées à cette opération, elles l’ont souverainement jugée illicite et ont considéré Astorc comme un délinquant comme les autres ». Pour l’avocat, c’est donc surtout du côté hexagonal que se situent les responsabilités. « Mon client a fait les frais d’une opération mal montée. Il faut remettre de l’ordre dans tout cela et réfléchir au statut et à la protection des mules sollicitées par les enquêteurs français », a expliqué Me Lévi à Jeune Afrique. Mais pourquoi les policiers français n’ont-ils pas avisé leurs homologues marocains ? Craignaient-ils d’éventuelles fuites dans la hiérarchie sécuritaire marocaine, dont certains responsables sont impliqués dans le trafic de stupéfiants ? La question reste posée. En attendant, Serge Astorc croupit dans une geôle de 20 m2 qu’il partage avec une vingtaine d’autres détenus. Aucun représentant de l’ambassade ou du consulat n’était présent à son procès. Me Lévi a immédiatement interjeté appel. Ce dossier diplomatico-policier devrait être rejugé à Tanger d’ici au printemps.

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