Au-delà des clichés
Des démographes révèlent que les flux d’Afrique subsaharienne vers le nord restent relativement limités.
Publié le 23 février 2009 Lecture : 1 minute.
Frappés par les images de migrants prenant d’assaut les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla, les Européens nourrissent souvent de graves préjugés sur l’immigration subsaharienne en Europe. C’est ce que s’attachent à dénoncer Cris Beauchemin et son collègue David Lessault, deux chercheurs à l’Institut national d’études démographiques (Ined), dans un article de la revue Population et Société (n° 452) intitulé « Les migrations d’Afrique subsaharienne en Europe : un essor encore limité ».
Les auteurs expliquent tout d’abord que la vague d’immigration en provenance du sud du Sahara est très récente. En France, par exemple, le recensement de 1962 ne faisait apparaître que 20 000 immigrés noirs, contre 570 000 pour celui de 2004. Une multiplication par 27 spectaculaire, certes, mais qui s’éclaire par le fait qu’on « partait de très bas », soulignent les auteurs. En 2004, les Subsahariens ne représentaient en France que 12 % de l’ensemble des immigrés, soit trois fois moins que les Maghrébins ou les Européens.
En 2000, moins de 1 % des personnes nées au sud du Sahara et de plus de 25 ans résidaient dans un pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), soit treize fois moins que les ressortissants d’Amérique centrale. En revanche, les Subsahariens se déplacent à l’intérieur du continent. En 1990, on enregistrait 258 000 migrations entre les pays d’Afrique de l’Ouest pour seulement 22 000 migrations de cette région vers l’Europe : un rapport de 1 à 10, à peine. Minoritaires en France, les immigrés d’Afrique noire le sont aussi dans le reste de l’Europe où, en 2000, ils ne représentaient que 6 % des immigrés. La Grande-Bretagne est la première destination, avec 21 % des flux, devant la France, 15 %, et d’autres pays comme l’Italie et l’Espagne. On est donc bien loin de l’« invasion » que certains politiciens agitent comme un épouvantail. Non sans succès, hélas.
