Coalition en panne
Un an après la mise en place du gouvernement d’union nationale, les tensions consécutives aux élections de décembre de 2007 se sont calmées. Mais les divisions subsistent au sein de l’exécutif, qui est menacé de paralysie.
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Communiqué de la présidence : « Le président Mwai Kibaki et le Premier ministre Raila Odinga ont formé un comité permanent de haut niveau qui facilitera la gestion des dossiers de la coalition. » Comme aveu d’échec, difficile de faire mieux. À la mi-janvier 2009, une équipe de douze personnes représentant les deux plus importants partis du Kenya (le Parti de l’unité nationale et le Mouvement démocratique Orange) était chargée de mettre de l’huile dans les rouages d’une coalition en panne, moins d’un an après sa mise en œuvre, le 28 février 2008.
Bilan négatif
Conclu sous le haut patronage de l’ancien secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, l’accord a permis au pays de mettre fin – au moins provisoirement – aux affrontements sanglants ayant suivi l’élection présidentielle contestée du 27 décembre 2007. Mais si la paix est revenue, les réformes attendues pour la consolider ne sont toujours pas au rendez-vous. Une étude réalisée par une société indépendante, South Consulting, auprès de plus de 4 000 foyers dresse un bilan très négatif de cette première année de partage du pouvoir. « Le gouvernement de coalition manque de cohésion et il est perçu comme une administration bicéphale. L’accord national est sujet à différentes interprétations selon le camp auquel on appartient. Ces divisions sont une menace pour un gouvernement qui risque d’échouer à mettre en place les réformes désirées. Il y a un manque crucial de vision collective. »
Au programme de la Coalition, il y avait l’adoption d’une nouvelle Constitution, la réforme foncière, le combat contre l’impunité ainsi que la lutte contre la corruption, le chômage des jeunes, la pauvreté, les inégalités… Aucun de ces objectifs n’a été atteint. Loin de là. Le 13 février, le projet de loi visant à mettre en place un tribunal spécial pour juger les responsables des violences postélectorales a été rejeté par le Parlement. Résultat : Kofi Annan devrait bientôt confier à la Cour pénale internationale une enveloppe cachetée contenant les noms de onze personnalités haut placées. Pour les Kényans, cela n’est pas plus mal. Plus de 80 % d’entre eux pensent que la CPI est mieux à même de rendre la justice qu’un tribunal kényan…
Scandales à répétition
À vrai dire, la multiplication des scandales a, ces derniers mois, confirmé que la corruption restait un mal endémique au sein de l’appareil d’État. Après la démission du ministre des Finances, en juillet 2008, en raison des anomalies ayant entouré la vente du Grand Regency Hotel, des « transactions irrégulières » ont été constatées au sein du Bureau kényan du tourisme, mais aussi entre la Kenya Pipeline Company et l’entreprise Triton Limited (avec un risque financier évalué à plus de 74 millions d’euros). Pis, alors que le pays connaît des difficultés alimentaires, de grandes quantités de farine de maïs importée auraient été détournées vers le Soudan voisin, où elle se vend beaucoup plus cher… Et ce n’est pas l’achat et la rénovation de l’ancienne Shell & BP House (pour 10 millions d’euros), dans le but d’offrir des bureaux au Premier ministre, qui redorera le blason d’hommes politiques peu enclins à jouer collectif.
Exilé au Royaume-Uni, victime de pressions et de menaces, le héraut de la lutte contre la corruption, John Githongo, s’apprête d’ailleurs à publier un brûlot dont le titre résume bien l’état d’esprit des Kényans : « C’est à notre tour de manger »*.
* It’s our Turn to Eat, par John Githongo et Michela Wrong, HarperCollins, 2009.
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