Présidentielle, mode d’emploi
Abdelaziz Bouteflika présente une feuille de route pour garantir la régularité, l’honnêteté et la transparence du scrutin du 9 avril. Et l’égal accès des candidats aux médias.
«Chaque chose en son temps », a coutume de répondre le président Abdelaziz Bouteflika à ceux qui le pressent de questions sur ses intentions ou sur son agenda à venir. Ainsi, pour convoquer le corps électoral en vue de la présidentielle, il a attendu la dernière minute (soixante jours avant le scrutin aux termes des délais légaux) pour signer, le 7 février, le décret annonçant la date du premier tour : le 9 avril. Le même décret porte désignation de l’ancien garde des Sceaux Mohamed Teguia à la tête de la Commission politique nationale de surveillance de l’élection présidentielle (voir ci-contre).
Les candidats à la candidature ont donc jusqu’au 22 février, minuit, pour déposer personnellement leur dossier auprès du Conseil constitutionnel. Outre des pièces administratives prouvant leur nationalité algérienne et celle de leur conjoint, une déclaration de patrimoine à l’intérieur et à l’étranger, et une attestation de participation à la guerre de libération (pour les candidats nés avant 1942), ils devront fournir les formulaires de parrainage, dûment signés et certifiés par des huissiers de justice, de 75 000 citoyens répartis sur au moins 25 des 48 wilayas que compte le pays (avec un minimum de 1 500 signatures par wilaya). À défaut de parrainages d’électeurs, ils devront justifier de celui d’au moins 600 élus.
Impartialité des pouvoirs publics
Le 10 février, trois jours après avoir convoqué le corps électoral, le président Abdelaziz Bouteflika, qui n’avait pas encore fait part de ses intentions, a fait paraître dans le Journal officiel une instruction à l’adresse de l’administration dans laquelle il présente une feuille de route pour garantir la régularité du scrutin, l’impartialité des pouvoirs publics et de l’administration locale, et l’égal accès des candidats aux médias, notamment la télévision et la radio publiques. Le soir même, l’unique chaîne de télévision terrestre a retransmis (en prime time !) l’intégralité de la conférence de presse de Mohamed Saïd annonçant sa candidature. Une première pour les téléspectateurs algériens, qui ont découvert le visage de cet opposant, ancien directeur de cabinet d’Ahmed Taleb Ibrahimi, personnalité historique et rival malheureux de Bouteflika en 2004, et dont le parti, Wafa (Fidélité, d’obédience islamiste), s’était vu refuser l’agrément par le ministère de l’Intérieur. C’est dire « l’ouverture ».
Des observateurs étrangers
Le 2 février, à l’occasion du sommet de l’Union africaine (UA) d’Addis-Abeba, où il s’était fait représenter par son ministre d’État Abdelaziz Belkhadem, Bouteflika a adressé un message à ses pairs pour leur assurer que le scrutin présidentiel sera honnête et transparent. Il s’est même engagé à inviter des observateurs étrangers pour superviser le déroulement de toutes les étapes du processus électoral, de la campagne (du 19 mars au 6 avril) jusqu’aux opérations de dépouillement. Il a donc convié l’UA à désigner une équipe d’observateurs. Outre l’organisation panafricaine, seront invitées par le Premier ministre, à la demande du président, trois autres organisations dont l’Algérie est membre : l’ONU, l’Organisation de la conférence islamique (OCI) et la Ligue arabe. « Insuffisant ! » a rétorqué l’opposition, qui met en doute les bonnes intentions présidentielles. Bien que boycottant l’élection, le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD, de Saïd Sadi) déplore le choix des scrutateurs étrangers. « Pourquoi faire appel à des agences intergouvernementales et à un syndicat de chefs d’État [en référence à l’UA, NDLR] en oubliant les ONG, tel le National Democratic Institute (NDI), ou des institutions plus crédibles, à l’instar du Parlement européen, dont la participation à la présidentielle ghanéenne a contribué à en faire un modèle de scrutin démocratique », dénonce le RCD sur son site.
Cependant, ce ne sont pas les états d’âme de l’opposition qui nourrissent l’inquiétude du gouvernement, mais plutôt le spectre de l’abstention. Une campagne de sensibilisation a été lancée par l’Alliance présidentielle – FLN, RND et MSP (ex-Hamas) – et l’ensemble des organisations favorables à un troisième mandat de Bouteflika – syndicats, patronat, organisations estudiantines, confréries religieuses et de nombreuses associations de la société civile, jusqu’aux mosquées, qui ont été mobilisées. Lors de la grande prière hebdomadaire du vendredi, il n’est pas rare d’entendre l’imam consacrer son sermon aux vertus du civisme et du devoir électoral. Plusieurs caravanes sillonnent les villes de l’intérieur du pays pour sensibiliser les jeunes sur les enjeux du scrutin et battre en brèche l’idée que l’élection est jouée d’avance. Pour éviter tout facteur favorisant l’abstention, le ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales a rouvert à titre exceptionnel la révision du fichier électoral entre le 10 et le 19 février. Pour justifier cette décision, l’administration a invoqué les nouvelles affectations de logements neufs au profit des habitants délogés des bidonvilles, ainsi que des sinistrés des récentes intempéries, notamment dans le sud du pays, à Ghardaïa, Bechar et Adrar.
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