Marabout, diamants et fraude fiscale

Un couple de Gabonais vivant en France est mis en examen pour blanchiment d’argent. Les fonds suspects auraient été versés par un marabout congolais célèbre à Libreville.

Publié le 17 février 2009 Lecture : 2 minutes.

L’affaire paraîtrait banale s’il n’était question de maraboutage. Et donc de marabout, mais aussi de détournement de fonds, d’escroquerie, de trafic de diamants et, pour couronner le tout, de fraude fiscale et de blanchiment en bande organisée. Ces deux derniers griefs ont conduit à la mise en examen, le 29 janvier dernier, de quatre Gabonais âgés de 40 à 56 ans par un juge d’instruction de Versailles. Autre détail piquant : selon le quotidien français Le Parisien, le nom du président gabonais Omar Bongo Ondimba serait cité dans la procédure, raison pour laquelle celle-ci a été « signalée » à la chancellerie française. Explications.

En décembre 2004, l’organisme français de surveillance des mouvements bancaires Tracfin (Traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins) alerte le parquet de Versailles au sujet de versements d’argent suspects sur le compte bancaire d’un couple de Versaillais d’origine gabonaise. Selon une source judiciaire, les sommes en question s’élèvent déjà à « plusieurs dizaines de milliers d’euros » et une enquête préliminaire est ouverte. Il se trouve qu’une grande partie des fonds suspects provient de la Belgique, où l’on s’intéresse de près aux activités du couple versaillais. Enquêtant sur un trafic de diamants d’une valeur de 11 millions de dollars, les autorités belges lancent, en novembre 2008, une commission rogatoire internationale qui concerne au premier chef un marabout congolais de 52 ans prénommé Étienne. Lorsque, le 1er janvier 2009, Tracfin fait un nouveau rapport sur des fonds suspects perçus par le couple versaillais à partir d’un compte togolais, une instruction judiciaire est ouverte. Ne reste qu’à entendre les quatre principaux suspects.

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Le marabout Étienne, sa compagne Marie-Rose et son complice présumé Jean-François, ainsi que l’épouse de ce dernier (c’est le couple versaillais) sont interpellés par la police judiciaire, le 27 janvier. Étienne nie en bloc les allégations des policiers : l’argent en question, dont 202 000 euros en liquide saisis à son domicile, proviendrait de ses honoraires de marabout. Il aurait été consulté par Omar Bongo Ondimba lui-même et divers membres de la famille de ce dernier, ce qui lui aurait fait une grande publicité. Mais n’ayant pas de papiers en règle, il ne pouvait ouvrir de compte en banque et utilisait celui de son ami Jean-François pour percevoir de l’argent de ses clients africains. Ce que l’intéressé confirme.

Mais la concubine d’Étienne, Marie-Rose, va plus loin encore. Elle accuse un « neveu » d’Omar Bongo Ondimba, Maurice Eyamba-Tsimat, ancien secrétaire général du ministère gabonais des Finances à la retraite, d’avoir détourné d’importantes sommes d’argent, notamment lorsqu’il était directeur de la Caisse autonome d’amortissement du Gabon. Ces sommes auraient été blanchies par l’intermédiaire du marabout. La juge d’instruction ira-t-elle pour autant enquêter à Libreville ? Peu probable. « La justice française s’en tient aux chefs d’accusation de blanchiment et de fraude fiscale, confie un substitut du procureur général de la cour d’appel de Versailles. Mais la justice belge, c’est une autre histoire. »  

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