Kamel Belabed

Porte-parole du collectif des familles de harraga disparus

Publié le 17 février 2009 Lecture : 2 minutes.

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Harraga: Un tabou maghrébin

Sommaire

Jeune Afrique : Depuis quand n’avez-vous plus de nouvelles de votre fils ?

Kamel Belabed : Mon fils Marwane, à l’époque âgé de 25 ans, est parti le 17 avril 2007 avec un groupe de dix personnes pour gagner les côtes italiennes [NDLR : depuis la région d’Annaba]. Depuis, je n’ai eu aucune nouvelle de lui. Je ne sais pas s’il est mort en mer. Nous avons contacté les gardes-côtes algériens, italiens et tunisiens, et tous sont formels : il n’y a pas eu de naufrage dans les vingt jours qui ont suivi son départ. Nous avons des raisons de croire que lui et ses compagnons se trouveraient en Tunisie, où une loi stipule que toute personne entrée illégalement est considérée comme terroriste potentiel. Nous avons interpellé le consulat et l’ambassade tunisiens en Algérie, mais jusqu’à présent ils affirment qu’ils ne sont pas en Tunisie. Nous sommes en droit de connaître le sort de nos enfants. Morts, noyés, disparus ou détenus, nous réclamons la vérité sur nos harraga.

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Pourquoi votre fils a-t-il pris la mer ?

Nous n’avions rien vu, rien su de son projet. À la maison, il n’a jamais fait état de son souhait de « brûler » la mer. Il avait un bon niveau intellectuel et gagnait bien sa vie en travaillant comme assistant dans mon agence de communication. Aussi, il n’avait absolument pas le profil d’un désespéré. Il voulait se rendre en France pour faire du tourisme et avait déposé plusieurs demandes de visa, qui n’ont, hélas, jamais abouti. Les voies légales fermées, il a opté pour l’illégalité. Je présume qu’à l’instar de millions de jeunes Marwane souffrait d’un mal de vivre. Il ne faut pas croire que tous ceux qui prennent la mer sont des chômeurs. Parmi eux, il y a même des universitaires. Ils partent parce qu’ils n’ont plus d’espoir en Algérie.

Avez-vous une estimation du nombre de harraga disparus en mer ?

Nos estimations ne sont pas exhaustives, mais nous pensons que, pour la seule région d’Annaba, plus de 500 personnes ont disparu en mer. On parle également de 600 corps dans les morgues espagnoles. Nous n’avons pas pu confirmer ce chiffre, mais nous savons que les autorités espagnoles ont adressé, il y a quatre mois, une correspondance au ministère algérien des Affaires étrangères pour leur faire état de la présence de 174 dépouilles d’Algériens dans leurs morgues.

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