Avigdor Lieberman

Leader de l’extrême droite israélienne

Publié le 17 février 2009 Lecture : 3 minutes.

C’est sur la rive orientale du fleuve Prut, à Kichinev, la capitale d’une Moldavie engoncée entre deux puissants voisins, la Roumanie et l’Ukraine, que se sont écrits les premiers mots d’une page contemporaine de l’État hébreu, il y a un demi-siècle. Cette ville austère a vu naître, en juin 1958, Avigdor Lieberman, désormais arbitre de l’exécutif hébreu depuis les élections du 10 février dernier. Regard vif et inquisiteur, barbe impeccablement taillée à l’iranienne, stature d’haltérophile bulgare, costumes cintrés, marié et père de trois enfants, résidant dans une colonie illégale ; tels sont les attributs de ce nouveau deus ex machina courtisé par Benyamin Netanyahou et Tzipi Livni pour tricoter une improbable équipe gouvernementale.

Le chef d’Israel Beitenou (« Israël, notre maison »), désormais troisième force politique du pays – devant les travaillistes – avec 15 sièges à la Knesset, a autant de surnoms que de carats sur la lunette de sa montre : « Yvette », « Raspoutine », « le Cosaque », « Caterpillar », « KGB ». Parti des contreforts des Carpates à l’aube de sa vingtième année pour rejoindre sa terre promise, il suit des études de sciences politiques à l’université hébraïque de Jérusalem. En 1999, il commence à promener sa silhouette de catcheur dans les couloirs de la Knesset. En dépit de soucis judiciaires récurrents, qui semblent être la nouvelle marque de fabrique de la classe politique israélienne, son ascension est fulgurante. Ministre en 2001, démissionnaire en 2002, re-ministre de 2003 à 2004 avant d’être remercié par Ariel Sharon pour son opposition au plan de désengagement de la bande de Gaza, Lieberman retrouve un portefeuille en 2006 dans le gouvernement d’Ehoud Olmert. Il rend son maroquin en janvier 2008 après avoir rompu avec Kadima. Souvent qualifié d’ultranationaliste, Lieberman sait aussi nouer des alliances, que ce soit avec le Likoud de Netanyahou, dont il fut le directeur de cabinet, ou le parti Kadima. Son programme peut faire frémir et sa rugosité slave se décline sans détour.

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Première ambition : « Je veux sauver Israël. Cet État a besoin d’un propriétaire et d’un patron. » Pour cet ashkénaze officiellement laïc, le principe « la terre contre la paix », pierre angulaire de toutes les ébauches de plans de paix depuis trente ans, est un non-sens. Forgé à l’école de guerre contemporaine des Balkans, Lieberman prône la constitution d’États « ethniquement homogènes ». Premiers visés par cette analyse roulée dans un fort accent russe : les Arabes israéliens, régulièrement désignés comme « la cinquième colonne » de l’État hébreu. N’hésitant pas à se référer au tribunal de Nuremberg pour demander la « condamnation à mort » des parlementaires arabes soupçonnés d’entretenir des relations avec le Hamas, ce farouche opposant au droit au retour assène que « les Arabes israéliens veulent profiter de tous les avantages de l’Israël moderne, mais, dans le même temps, veulent nous détruire de l’intérieur ». Dans un style à faire tousser les excellences des chancelleries européennes, celui dont les détracteurs gaussent l’ancienne expérience de videur de boîte de nuit enfonce le clou : « Nous devons poursuivre notre combat contre le Hamas comme l’avaient fait les États-Unis contre les Japonais pendant la Seconde Guerre mondiale. » En marge de ces considérations nucléaires, qui semblent trouver un large écho dans la communauté russophone, le patron d’Israel Beitenou ne cache pas son admiration pour la façon avec laquelle Vladimir Poutine a « réglé le problème tchétchène ».

Commentant le chaotique processus de paix israélo-palestinien, Lieberman ne fait pas dans la dentelle : « Dans cette région, les peuples se comportent comme des races animales : les faibles attendent que le fort s’affaiblisse pour le dévorer. Désormais, il n’y a plus de place pour le compromis, on ne nous crachera plus à la figure. » Mais ce ne sont pas tant ses compatriotes arabes ou les Palestiniens qui sont dans le viseur du bulldozer Lieberman que l’Iran, érigé au rang de « grand Satan », qu’il propose « d’écraser ».

Que conclure de ce sulfureux florilège ? C’est à Netanyahou ou à Livni de trancher. Mais, déjà, il semble que ce « pyromane promu au rang de chef pompier », selon l’analyse de l’écrivain David Grossman, pourrait un jour rendre des comptes à la justice pénale internationale, dont l’ombre plane sur l’exécutif israélien. Aujourd’hui pour ses propos. Demain, peut-être, pour sa soif d’action.

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