Le choc des mémoires

Publié le 10 février 2009 Lecture : 2 minutes.

Ne rions pas trop quand le Hamas déclare qu’il a gagné la guerre. Il n’a pas tort pour cinq raisons :

1. L’agression israélienne vient de le consacrer comme un partenaire légitime aux yeux des politiques et de lui gagner la sympathie des élites, fussent-elles opposées à son idéologie.

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2. La « question palestinienne » est plus que jamais en exergue. Le monde sait maintenant que l’État hébreu est le dernier pays occupant sur terre, qu’il peut tuer par milliers les Palestiniens, il ne fera que rendre plus visible leur drame et la nécessité d’une solution.

3. Israël vient de faire la démonstration contraire de ce que partout il s’évertue à faire croire : qu’il est un pays démocratique, laïque et civilisé. Comment entendre sans sourire, désormais, tous ceux qui renvoient à la figure des Arabes : « Israël, au moins, est une démocratie » ? Un État qui occupe, agresse et tue peut-il se targuer d’être une démocratie ? Un État qui dit respecter la liberté d’expression peut-il interdire à la presse de couvrir une guerre ? Un État qui prétend faire partie du « monde libre » peut-il maintenir la prison la plus gigantesque de la planète, Gaza ?

4. Israël vient encore une fois de jeter le discrédit sur les dirigeants occidentaux, en démontrant combien ils sont prêts à devenir son allié subjectif aux dépens des grands principes qu’ils s’échinent à enseigner par ailleurs au reste du monde.

5. La guerre israélienne vient de pousser l’opinion internationale à se poser cette question terrible pour les juifs du monde entier : par quelle ironie de l’Histoire la victime d’hier peut-elle devenir l’agresseur d’aujourd’hui ? C’est d’ailleurs sur ce point, et malheureusement encore pour Israël, qu’il faut constater comment l’offensive sur Gaza a entamé le capital de sympathie des juifs et donné lieu à une dérive langagière des plus tristes : l’on s’indigne moins du recours à une terminologie jusque-là réservée à juste titre au drame juif : « Holocauste », « Shoah », « camps de concentration ».

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Maintenant que le feu a (plus ou moins) cessé, quelle issue pour Israël ? Opprimer les Gazaouis, les enfermer comme des singes dans un zoo, persister à détruire leurs infrastructures que les contribuables européens et arabes paient de leur poche ? Et après ? Les Palestiniens n’abandonneront jamais leur cause. À tort ou à raison, les musulmans auront la Palestine fichée au cœur. Il n’y a qu’à voir l’affluence des jeunes Arabes et des jeunes Africains dans les récentes manifestations de soutien à Gaza, en France. Qu’ont-ils à voir avec la Palestine, ces Beurs et ces Blacks qu’on dit indifférents à la politique et peu enracinés dans leur culture d’origine ? Non, ils ne confondent pas les conflits, ni n’identifient Gaza au 9-3. C’est l’injustice et le deux poids deux mesures qui les indignent. C’est cette cause qui coule dans leur sang par on ne sait quel miracle de la mémoire…

Eh oui ! Chacun pourra désormais brandir sa mémoire. Une surenchère qui ne grandira pas l’humanité… 

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