La petite musique de Marie Ndiaye

À l’affiche à Paris, Rien d’humain dévoile toute la mélodie de l’écriture de la Franco-Sénégalaise.

Publié le 5 février 2009 Lecture : 2 minutes.

Un homme, deux femmes et des fantômes d’un passé lointain qui rend impossible toute communication entre eux. On pourrait résumer ainsi la pièce de Marie Ndiaye, Rien d’humain, à l’affiche jusqu’au 7 février au Théâtre de l’Est parisien*. Et en matière de fantômes, Marie Ndiaye s’y connaît. Toute son œuvre, qu’il s’agisse de romans (Rosie Carpe, prix Femina 2001) ou de pièces de théâtre (Papa doit manger, entrée au répertoire de la Comédie-Française en 2003), est empreinte d’une ambiance fantomatique.

Dans cette pièce brève, quasi minimaliste, trois protagonistes s’affrontent. De retour en France au terme d’un séjour américain désastreux, Bella veut récupérer l’appartement qu’elle avait prêté à Djamila. Laquelle ne l’entend pas de cette oreille. Les deux femmes se déchirent. Il est question d’enfance souillée, de viol, de dépossession. Les dialogues sont d’une violence inouïe. « Elle a été élevée dans l’obsession du sexe, l’absence de domination de soi et l’ignorance de toute loi », affirme Bella au sujet de son amie. Au détour de quelques révélations sur un passé enfoui de ressentiments et de mépris, la pièce, d’apparence réaliste, bascule dans un huis clos inhumain et irrespirable. Ici, l’amour qu’éprouve pour Djamila le seul protagoniste masculin, Ignace, semble déplacé, hors de propos.

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« Ces deux femmes, explique le metteur en scène, Olivier Werner, incarnent en quelque sorte deux aspects de la personnalité de Marie Ndiaye : la prolétaire et la bourgeoise. La haine que Bella et Djamila éprouvent l’une envers l’autre, c’est une haine de classe, érigée par l’auteur en véritables joutes de langage. » Le metteur en scène a sorti les personnages de leur appartement et les a placés à l’extérieur, dans un square impersonnel et public pour mieux faire résonner leurs propos. De là, Bella et Djamila peuvent déclamer leur détestation de l’autre, du différent, dans une langue « d’une extravagance belle et raffinée » qui serait pour Werner la marque de fabrique de la « petite musique Marie Ndiaye ».

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