Courrier des lecteurs


Salut l’artiste !

– Si la politique est un art, George Bush en est un virtuose à qui l’on doit rendre hommage. À quel critère reconnaît-on un grand dirigeant ? À sa capacité à organiser sa succession. Qui peut nier que sans la politique que Bush a menée durant ces huit années jamais Barack Obama n’aurait été élu ?

En véritable Pygmalion du jeune Obama, Bush a sorti son coup de maître lors de la guerre d’Irak. Manipuler le secrétaire d’État, l’intègre général Colin Powell au point de le pousser à mentir devant l’ONU sur de prétendues armes de destruction massive qu’aurait possédées Saddam Hussein, puis le contraindre à la démission. Chapeau ! Rendre cette guerre odieuse en la sous-traitant à des pauvres types sous-payés par des entreprises privées, superbe ! Oser dynamiter le capitalisme en nationalisant Wall Street à quelques semaines de son départ de la Maison Blanche, il faut le faire ! Et n’oublions pas de mentionner son chef-d’œuvre : le refus de signer le protocole de Kyoto. Dans quelques années, si l’Histoire a un sens, Bush remplacera Che Guevara sur les tee-shirts. Alors, pour sa sortie, salut l’artiste !

Alain Gilles Boui, Paris, France

Hypocrisie occidentale

– Rien ne peut exprimer le sentiment d’impuissance et de frustration, la peine et la tristesse de millions d’hommes répartis sur la rive sud de cette mer Méditerranée que nous voulons facteur de paix et de justice pour les générations futures. L’affliction est d’autant plus grande qu’elle est doublée d’une incompréhension immense et révoltante quant aux buts et aux cibles avoués et inavoués de l’action israélienne, absurde par ses disproportions. Comment l’Occident, en l’occurrence l’Europe et les États-Unis, peuvent-ils justifier la « carte blanche » qu’ils délivrent aux bouchers de Tel-Aviv ? Les âmes innocentes des enfants martyrs hanteront-elles longtemps la conscience des dirigeants occidentaux ? Ceux-ci haussent le ton avec la Russie en Géorgie, et imposent rapidement un cessez-le-feu. Mais en Palestine, il ne faut pas contrarier l’allié israélien, qui doit achever son « travail ». On se contente donc de reproches « équilibrés » adressés aux « belligérants », ce qui est le comble de l’hypocrisie occidentale…

Béchir Lassoued, Tunis, Tunisie

Maghreb à géométrie variable

– Le Maghreb sera durement touché par la crise financière et la récession économique mondiales en 2009 et même après. Résultat : une forte poussée du chômage, surtout chez les jeunes, et des secousses sociales et politiques sont à craindre. Mais le mistral soufflant d’Europe vers le Maghreb pourrait être neutralisé par un sirocco soufflant, cette fois, du Maghreb vers l’Europe. Pour cela, il faut saisir cette occasion historique de passer à l’intégration économique maghrébine.

Avec l’éternel problème du Sahara non encore réglé, il serait illusoire de voir l’Algérie et le Maroc avancer sur ce chemin. C’est pourquoi il faut passer à un Maghreb à géométrie variable. Dans ce cadre, on pourrait parfaitement envisager une union douanière et une union monétaire entre l’Algérie et la Tunisie. L’union douanière permettrait la libre circulation des biens et des services entre les deux pays, et l’union monétaire la création du dinar maghrébin, avec un institut d’émission unique et des réserves de change communes. L’Algérie et la Tunisie pourraient ainsi administrer la preuve de leur vision courageuse et innovante de l’avenir et affronter la crise avec vigueur et sérénité.

Moncef Guen, Washington, États-Unis

Droit au but 

– Je suis tombée amoureuse de l’Afrique en 2006 lors d’un trek à pied chez les Massaïs au Kenya, et depuis je continue à la découvrir : Bénin, Sénégal, Maroc… Et je suis loin de m’arrêter. À mon retour en 2006, j’ai aussitôt cherché un média se rapportant au continent, et je suis tombée sur J.A., que je n’ai pas quitté depuis. Je ne pourrais que lui répéter les nombreux éloges déjà faits par ses lecteurs, aussi je voudrais juste, en guise de reconnaissance, livrer une photo prise en août lors d’un de mes passages en Casamance nord (route de Baïla à Abene), illustration parfaitement adaptée, je crois, de l’éditorial « Droit au But » de Marwane Ben Yahmed (J.A. n° 2500) !

Claire Saubusse, Bruxelles, Belgique

Démographie explosive

– Fidèle lecteur de J.A., je me permets de réagir à l’article intitulé « Le monde qui nous attend » (J.A. n° 2505). Le rapport dit « Global Trends 2025 » du National Intelligence Council me paraît pessimiste sur un point important qui appelle plus de commentaires. Le point 7 prévoit en effet que 97 % de la croissance démographique mondiale se fera en Asie, en Afrique et en Amérique latine, quelques pays d’Afrique subsaharienne et du Moyen-Orient ayant une démographie explosive et une proportion de jeunes constituant un risque d’instabilité. La démographie appelle la plus grande attention, elle est à l’origine de beaucoup de conflits. En l’espèce, il me semble que ce point 7 aurait dû venir en premier dans l’article et que les hypothèses pour l’avenir auraient pu être explicitées de ce point de vue.

Christian Join-Lambert, Paris, France

Discours de Dakar : l’esprit et la lettre

– J’avoue avoir été un peu surpris par la référence au « discours de Dakar » dans le « En vérité » intitulé « Thank you Ghana » (J.A. n° 2505). J’étais présent dans l’amphithéâtre de l’université Cheikh-Anta-Diop et j’ai pu lire ce discours à plusieurs reprises. Je n’y ai jamais trouvé, ni dans la lettre, ni dans l’esprit, l’affirmation que « les élections sur le continent sont par définition truquées, frauduleuses et ethnicisées, rituels politiques purement formels, luxes inutiles, bouffonnerie de rois nègres et tragiques illustrations de l’incapacité pathologique des sociétés africaines à assimiler la modernité politique ».

Je conçois que l’on puisse critiquer le discours de Dakar, mais j’estime que l’auteur exagère très lourdement dans la caricature. La démocratie et les élections n’étaient pas le thème central du discours de Dakar, et rien dans les références aux droits de l’homme et à la démocratie figurant dans ce discours ne ressemble à ce qu’il évoque. S’il cherche en revanche sérieusement des prises de position détaillées du président français sur la question des élections et de la démocratie en Afrique, je l’invite à relire les discours prononcés au Cap le 28 février 2008 et à New York, aux Nations unies, le 22 septembre 2008 (ces documents sont disponibles sur www.elysee.fr).

Marcelin Leroy, Paris, France

Réponse : Je confesse avoir été caricatural en ce qui concerne la lettre du discours. Mais l’ai-je été vraiment en ce qui concerne l’esprit ? Pour le reste, c’est vrai, Le Cap a heureusement rattrapé Dakar. F.S.

Bonne année panafricaine…

– Je souhaite que cette nouvelle année 2009 soit une année de confiance mutuelle, de dialogue, de paix et de solidarité en Afrique et surtout entre Africains. Et aussi une année panafricaine qui aille, lentement mais sûrement, dans le sens de la construction des États fédérés d’Afrique. Car, comme le disait Kwame Nkrumah, « unis, nous sommes forts, mais divisés, nous sommes faibles ».

Joseph Diedhiou, Dakar, Sénégal

Israël, pays arabe

– Je tiens à répondre à un lecteur de Djeddah (Arabie saoudite) qui, dans J.A. n° 2495, plaide pour l’intégration d’Israël dans la Ligue arabe. Il a énuméré les facteurs en faveur de cette intégration mais a omis, ou oublié, le plus essentiel à mes yeux : c’est qu’Israël compte plus de 1,5 million d’Arabes dont les parents, en 1948, ont refusé de quitter leurs terres et leur pays et ont décidé d’y vivre malgré la politique d’apartheid et de marginalisation que l’État hébreu leur impose. Mais je pense que les pays Arabes n’accepteront pas la candidature d’Israël, tout simplement parce qu’Israël deviendrait alors le pays arabe le plus développé et, surtout, le plus démocratique. On peut toujours rêver…

Hédi Ajissi, Dehibat, Tunisie