Enquête au coeur des ténèbres

Corsika, le dernier polar de notre collaborateur Nicolas Michel, nous entraîne dans la moiteur ougandaise. Là où se mêlent mafia corse, Françafrique et grand banditisme…

Publié le 27 janvier 2009 Lecture : 2 minutes.

Étienne Gouirand reprend du service. Créé il y a trois ans par notre collaborateur Nicolas Michel, ce commissaire marseillais, grand amateur de pêche à la castagnole au large du Frioul, quitte cette fois les quais du Vieux-Port pour ceux de Propriano, en Corse. Le corps de son ami, le journaliste Sergio Morrachini, a été retrouvé froidement abattu de deux balles de Sig Sauer SP 2022.

Entre crime crapuleux et règlement de comptes nationaliste, les enquêteurs pataugent. Jusqu’à ce que le flic marseillais découvre que la victime aurait mis le doigt sur un trafic pour le moins exotique… Une sorte de réseau international, dont une improbable ONG, Great Lake Children, semble être le maillon corse. Reste à savoir à qui profite le crime. Les soupçons convergent vers l’Afrique de l’Est, au cœur des ténèbres… Étienne Gouirand s’embarque pour l’Ouganda afin d’enquêter sur une société d’import-export, CorsiKa Ltd., dont le nom est apparu au fil de l’enquête. Mais s’il est difficile pour un « pinzutu » – un Français du continent – d’enquêter sur l’île de Beauté, il n’est pas non plus évident pour un flic français de se fondre dans la foule de Kampala…

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Si Nicolas Michel a choisi de confier une nouvelle mission au commissaire Gouirand, celle-ci n’a que peu de points communs avec la précédente. De l’immersion dans le maquis corse à la plongée au cœur d’une métropole africaine, l’auteur nous entraîne en apnée prolongée dans des ambiances qui lui sont familières (il a vécu en Ouganda avant d’être journaliste à Jeune Afrique), et qu’il évoque avec justesse, sans en rajouter.

Entre la mafia immobilière qui gangrène le littoral méditerranéen et la moiteur poisseuse des night-clubs de Kampala, il distille avec efficacité et précision des images de deux mondes qui se croisent et se rejoignent, pour le malheur des uns et le profit des autres : « La Corse, c’est un peu comme certains pays d’Afrique. Tout se sait. Les murs parlent, et quand ce ne sont pas les pierres, ce sont les chèvres qui chuchotent, les vaches qui murmurent, et les eucalyptus qui se confient. »

Et, dans cette fiction funeste qui flirte en permanence avec la réalité, certains personnages brillent par leur authenticité. Le portrait que l’auteur brosse de Jacques Scarbonchi, « digne » ambassadeur de la diaspora corse sur le continent africain, est un modèle du genre. « Ex-voyou » ayant écumé les bas-fonds marseillais, ancien du SAC (Service d’action civique), un homme « doué pour faire bosser les autres et ne se mouiller qu’à distance », entrepreneur recyclé dans l’import-export, les machines à sous et la corruption au sud du Sahara, représentant local d’un parti politique français qui puise dans les activités interlopes de ses « honorables correspondants » les subsides nécessaires au financement de ses campagnes électorales…

Bref, un flibustier de la Françafrique qui aime surtout faire l’amour nuitamment dans sa piscine avec de très jeunes Ougandaises. Symbole des liaisons incestueuses entre grand banditisme et politique, le nom de Scarbonchi aurait pu figurer dans le dossier d’instruction de l’affaire Elf ou dans celui de l’Angolagate. Finalement, c’est l’affaire CorsiKa qui l’aura fait tomber. Évidemment, toute ressemblance avec des personnages ayant existé ne serait que pure coïncidence… 

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