Entre rires 
et larmes

Plusieurs films à l’affiche traitent de sujets très sérieux (terrorisme, religion, Shoah). Mais leurs réalisateurs ont choisi des genres différents. Comédie ou drame. Pour un résultat mitigé.

Publié le 27 janvier 2009 Lecture : 3 minutes.

La religion (Religolo, de Larry Charles), le terrorisme (Espion(s), de Nicolas Saada), l’antisémitisme et l’extermination des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale (Plus tard tu comprendras, d’Amos Gitaï) ou la résistance à Hitler en Allemagne (Walkyrie, de Bryan Singer)… les thèmes de plusieurs films qui sortent actuellement sont on ne peut plus sérieux. Et, comme toujours en matière de septième art, sont prétexte à des genres fort différents. Mais proposer au spectateur plutôt de rire, de sourire, de s’émouvoir ou de s’angoisser… n’est pas sans risque.

L’exemple le plus caricatural nous est fourni par Religolo. Comme l’indique le titre de ce documentaire très particulier, c’est avec humour que la vedette de la télévision américaine Bill Maher, dont on suit ici un périple planétaire, a choisi de nous faire part de ses doutes quant au sérieux des messages religieux. Il réussit à nous faire rire, à travers une série d’interviews cocasses de zélateurs des grandes religions monothéistes. Et démontre combien les croyants qui ont la « foi du charbonnier » défendent des affirmations qui ne résistent pas une seconde à un examen rationnel. Avec un talent minimal de dialecticien et un bon sens de la repartie, il est aisé de tourner en ridicule, par exemple, un chrétien qui assure que Jésus a bien marché sur l’eau ou un évangéliste militant qui refuse de croire que l’homme, créé par Dieu, puisse vraiment descendre du singe. Même démonstration avec des musulmans ou des juifs.

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Mais, en procédant ainsi, on n’apprend rien sur les religions – leur genèse, leur raison d’être, etc. – ni sur leurs fidèles et leurs motivations profondes. En un mot, quand on force le spectateur à devenir complice du réalisateur, ici en « religolant », on ne peut convaincre que ceux qui ont les mêmes certitudes ; ce qui n’a pas grand intérêt.

L’approche sérieuse est-elle plus satisfaisante ? Parfois, mais pas toujours. Pour Walkyrie, le réalisateur, Bryan Singer, a choisi un mode à la fois réaliste et épique. Il raconte ainsi le plus célèbre attentat contre le Führer en 1944 avec Tom Cruise dans le rôle de l’instigateur du complot raté. Ce dernier finit en martyr antinazi. Bryan Singer parvient sans doute à captiver et émouvoir bien des spectateurs. Mais ceux-ci n’ont qu’accessoirement l’occasion de s’interroger sur la dictature du IIIe Reich et sur la possibilité de résister à un tel régime. À trop devoir se demander sans aucun recul si le héros va ou non réussir dans son entreprise, on en oublie que le thème du film n’est pas anodin et garde toute son actualité.

En revanche, le grand cinéaste israélien Amos Gitaï évite cet écueil en traitant sur un mode beaucoup moins narratif, loin du style « reconstitution historique », une autre histoire vraie de la Seconde Guerre mondiale. Un demi-siècle après la disparition de l’un de ses membres, déporté et assassiné en Allemagne, une famille juive de Paris n’a toujours pas réussi à en faire le deuil. En choisissant un abord subjectif pour évoquer la vie de cette famille, il invite le spectateur à ressentir ce que peut être un tel vécu. Au final, c’est très convaincant, très « parlant », même s’il ne s’agit pas là du meilleur long-métrage de Gitaï.

D’un point de vue historique, l’approche réaliste pour un sujet relevant totalement de la fiction est évidemment moins risquée. Ainsi, dans Espion(s), qui raconte comment un attentat-suicide islamiste a été préparé à Londres et à Damas et mis en œuvre à Paris, nul n’a besoin de croire que les personnages ont existé. Avec ce premier film réussi, Nicolas Saada tient le spectateur en haleine jusqu’à la fin du film. Certes, le choix de la pure fiction ne met pas l’auteur à l’abri des clichés sur le terrorisme islamiste et les services secrets. Il permet au moins de ne pas les gratifier du sceau de la vérité avec un grand V.

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