Adresse à Barack Obama

Héritiers d’Aimé Césaire, les écrivains martiniquais Édouard Glissant et Patrick Chamoiseau viennent de publier chez Galaade, un éditeur parisien, un livre intitulé L’Intraitable Beauté du monde, dont nous reproduisons ici quelques extraits.

Publié le 27 janvier 2009 Lecture : 2 minutes.

« Un Nègre disposant du plus grand des pouvoirs (symbole précieux) ne changera rien comme par magie à la condition immédiate des Nègres des États-Unis ou du monde, et rien non plus à la condition immédiate des peuples soumis à la régie des capitalismes et des standards occidentaux. Dans le cas de M. Mandela comme dans le vôtre, le symbole s’élève pourtant, capital, non pas pour la raison qu’il peut directement changer les choses, mais parce qu’il permet de désigner à haute intensité tout ce qu’il y a eu et qu’il pourrait y avoir de maladif et d’insupportable dans les rapports entre humanités, chaque fois qu’elles s’agrègent en corps collectifs. […]

Nommer les Afriques noires au cœur de toutes les urgences du Tout-Monde, se rappeler les crimes subis, instruire les histoires de leurs déséquilibres, réparer les outrages, annuler les dettes, ouvrir l’accès aux formations et aux savoirs, instaurer en tout des pratiques équitables, légiférer en tout contre les prédations… – Nommer !

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Créer un tribunal international pour juger les crimes économiques, financiers : car les émeutes de la faim, les émigrations hagardes, les désastres qui anéantissent les peuples ne sont jamais de génération spontanée. Il ne saurait y avoir de zones d’impunité ni de crimes innommés dans le Tout-Monde… – entreprendre !

Distribuer, par une autorité mondiale, entre les endroits d’abondance, à hauteur de leur emprise sur la richesse de la planète, les parts d’immigration à absorber, les charges de misères à assumer, les devoirs face aux afflux des catastrophes, que tous soient les servants de toutes les soifs et de toutes les famines… – Oser ! […]

Entendez le cri du monde ! Ce n’est pas là une supplication. Non point pour cela que vous seriez appelé à diriger ce monde, mais pour la raison qu’il vous confirmera en vous-même, vous faisant partager les responsabilités de son devenir. […]

M. Nelson Mandela pendant vingt-huit ans d’une solitude qui fut, on voudrait le croire, partagée par tous, a médité son pays, et son pays dans le Tout-Monde, il a agi et pensé au plus large et il s’est très vite éloigné du pouvoir. Il a quitté la force pour entrer en puissance.

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Justice en Palestine, non pas dans la force, mais dans la puissance du droit. Justice en Israël, non pas dans la force, mais dans la puissance du droit. Justice en Israël, non pas dans la force, mais dans la puissance de l’équité partagée.

Justice en tous les lieux abandonnés, livrés aux massacres, aux pandémies, ou tout simplement laissés à la merci des eaux, des vents et des feux. »

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L’Intraitable Beauté du monde, adresse à Barack Obama, par Edouard Glissant et Patrick Chamoiseau, Galaade éditions/Institut du Tout-Monde, 64 pages, 8 euros.

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