Karim Wade dans l’arène
Le fils du chef de l’État sera candidat à Dakar lors des élections locales du 22 mars. Déjà, certains lui prêtent de plus hautes ambitions. Mais il y a encore loin de la coupe aux lèvres.
Comme un film de série B, la vie politique sénégalaise n’est pas avare de vrais-faux rebondissements et de vraies intrigues. À se demander si un happy end est possible !
Après l’acharnement contre Macky Sall, qui aboutit au départ du président de l’Assemblée nationale et à sa démission du Parti démocratique sénégalais (PDS, au pouvoir), les Sénégalais ont assisté au retour d’Idrissa Seck, l’ancien Premier ministre banni pendant quatre ans, dans le giron du président Abdoulaye Wade. Résultat, Rewmi, sa formation, est divisée. Et le PDS aussi. À quelques semaines des élections locales du 22 mars, ça fait désordre… D’autant qu’« Idy » a choisi de rentrer dans le rang au moment précis où les partis constituaient leurs listes (bouclées le 20 janvier, à minuit).
Et voici que Karim Wade, le fils du président, confirme son intention d’entrer dans l’arène politique. Son nom figure en troisième position sur la liste de la coalition Sopi 2009 conduite par Pape Diop, le maire sortant et président du Sénat. La nouvelle n’a suscité que peu de commentaires, même l’intéressé est resté silencieux.
En fait, il y a longtemps que personne ne doute des intentions de « Karim », comme tout le monde l’appelle ici. À en croire les cadres de son mouvement, la Génération du concret (GC), ses ambitions ne se limitent d’ailleurs pas aux élections locales : il envisage tout simplement de succéder à son père en 2012. Mais il y a encore loin de la coupe aux lèvres…
Devenir maire de Dakar ne sera pas chose aisée. Le mode de scrutin étant ce qu’il est, il faudra que la liste de la coalition Sopi 2009 emporte la majorité des suffrages à Dakar, puis que les vainqueurs se mettent d’accord sur le candidat qu’ils souhaitent investir, enfin que celui-ci rafle la majorité des voix des cent conseillers municipaux.
Unanimité ?
Apparemment, le maire sortant ne voit aucune objection à s’effacer devant Karim, mais rien ne dit que celui-ci fera l’unanimité. Selon plusieurs sources, son arrivée n’a pas fait que des heureux au PDS. Le fils du président, même s’il a parfois été vu au côté de son père lors des campagnes électorales de 2000 et 2007, n’a aucune légitimité, estiment ses détracteurs. Il n’a tout simplement « pas la carrure d’un homme politique », renchérissent certains. Il est vrai que son côté un peu effacé le dessert. Même l’un de ses proches reconnaît que, pour s’imposer, il va lui falloir « se faire violence » pour apparaître sur le devant de la scène.
Du côté de Benno Siggil Senegal (BSS), la plus forte coalition de l’opposition jamais constituée (elle regroupe une trentaine de partis), l’optimisme est de rigueur. Chacun se déclare prêt à mener le combat contre le PDS, jugé affaibli par les dernières péripéties politiques. « Nous avons des chances de remporter les principales villes du pays, dont Dakar », pronostique Serigne Mbaye Thiam, membre du Parti socialiste et du Comité national électoral de BSS.
Sur la liste présentée par la coalition d’opposition à Dakar figurent des personnalités comme Khalifa Ababacar Sall, un ancien ministre du Commerce, ou Doudou Issa Niasse, adjoint de l’ancien maire de Dakar Mamadou Diop. Reste qu’il est encore difficile de dire qui seront les challengeurs de Karim, dans la mesure où le premier vote concerne une liste, non des individus.
Le budget de Dakar était en 2008 de 32 milliards de F CFA (près de 490 000 euros). Il pourrait atteindre 100 milliards d’ici à quelques années. Karim dispose-t-il des compétences pour gérer une ville aussi importante ? Membre de la direction de la GC et conseiller du chef de l’État, Hassan Bâ n’en doute pas une seconde. Il exprimait récemment sur les ondes d’une radio privée son refus de « voir des médiocres prendre ce pays en otage ». Pour lui, le fils du président est parfaitement capable de « faire émerger un nouveau type de leadership ».
L’expérience acquise par Karim à la présidence de l’Agence nationale de l’Organisation de la conférence islamique (Anoci) est sans nul doute un atout. « Les importants chantiers routiers réalisés à Dakar témoignent de ses capacités. Il a envie de poursuivre son œuvre, voilà pourquoi il est candidat à la mairie », explique-t-on dans son entourage. L’opposition n’est évidemment pas de cet avis. Elle exige même un audit sur la gestion de l’Anoci, qui aurait dépensé 376 milliards de F CFA pour des chantiers censés être financés par certains États membres de l’OCI.
Manque de visibilité
S’il est clair que la GC est prête à défendre la candidature de Karim jusqu’au bout, celle-ci manque pour l’instant de visibilité. Le fils du président aurait intérêt à communiquer davantage. Or, depuis le 11e sommet de l’OCI, en mars, il ne l’a jamais fait. Alors que sa campagne sera officiellement lancée le 1er mars, même ses proches ne s’avancent pas trop sur sa stratégie. Fera-t-il ou non campagne ? « Il n’en a pas besoin, car c’est lui qui tient le Palais », murmurent certains.
Selon la presse sénégalaise, son président de père aurait récemment confié aux militants du PDS que « ce n’est pas parce qu’on est tête de liste que l’on devient forcément maire ». Si l’on comprend bien, Karim, qui figure en troisième position sur la liste Sopi 2009, aurait donc toutes ses chances. À condition, bien sûr, que ladite liste l’emporte à Dakar.
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