Jean Ping
Président de la Commission de l’Union africaine
Jeune Afrique : Que pensez-vous de l’offensive israélienne à Gaza ?
Jean Ping : Nous sommes consternés par cette tragédie. Immédiatement après l’attaque du 27 décembre, nous l’avons condamnée. Répliquer aux tirs de missiles du Hamas est une chose, mais de cette façon-là… La réaction d’Israël est disproportionnée. Des femmes, des enfants, des familles entières ont été tués. Plus de mille morts, c’est quelque chose d’effrayant. L’Afrique appelle de ses vœux un sursaut de conscience pour l’arrêt immédiat de l’effusion de sang et la relance des efforts de paix.
Le Hamas porte-t-il une responsabilité dans cette guerre ?
Je ne me prononce pas sur les problèmes qui divisent les Palestiniens. Pour le moment, l’Union africaine reconnaît l’OLP comme représentant légitime du peuple palestinien. Et le président Mahmoud Abbas assiste régulièrement à nos rencontres. Mais nous n’ignorons pas que le Hamas existe et a remporté des élections législatives organisées à la demande de la communauté internationale. Alors je vois mal comment les problèmes peuvent être résolus si l’on ignore le Hamas. Je constate d’ailleurs que la grande majorité des pays est convaincue qu’il doit être partie intégrante de la solution. Donc, à un moment ou à un autre, il faudra intégrer le Hamas aux pourparlers de paix.
Le fait que le Hamas ne reconnaisse pas l’existence d’Israël est-il un obstacle à la paix ?
Pour le Quartet [États-Unis, Union européenne, Russie et ONU, NDLR], « la solution, c’est l’existence de deux États, Israël et la Palestine, vivant côte à côte et se reconnaissant mutuellement ». L’UA soutient cette feuille de route. Le Hamas peut avoir une position, mais, si l’accord est conclu, tout le monde devra le respecter et le Hamas devra forcément faire un geste politique.
L’UA invitera-t-elle un jour le Hamas à ses sommets ?
Ce n’est pas impossible, cela dépend des États membres. Mais je ne pense pas que la question sera à l’ordre du jour du prochain sommet, le 1er février, à Addis-Abeba.
Deux coups d’État militaires depuis le dernier sommet de l’UA, n’est-ce pas inquiétant ?
Si, bien sûr. En six mois, il y en a même eu presque trois. Deux réussis, en Mauritanie et en Guinée. Et un raté, en Guinée-Bissau. C’est dramatique et c’est la raison pour laquelle nous avons exclu la Guinée des activités de l’Union jusqu’au retour à l’ordre constitutionnel. Mais les putschistes de Conakry promettent d’organiser très vite des élections auxquelles ils ne participeront pas. Après les condamnations d’usage, il est donc normal que nous aidions les Guinéens à sortir de la crise.
En Mauritanie, la junte a l’intention de présenter l’un de ses membres à l’élection présidentielle du mois de mai. N’est-ce pas encore plus préoccupant qu’en Guinée ?
Si, c’est bien plus préoccupant, il n’y a pas de comparaison. Les auteurs du coup d’État de Nouakchott veulent confisquer la démocratie – et pour longtemps. La Guinée se montre extrêmement flexible et favorable à ce que nous demandons. Pas la Mauritanie.
La démocratie est-elle en recul en Afrique ?
N’oubliez pas que nous avons eu une élection exemplaire au Ghana, qui a débouché sur une alternance, dans le calme. Il y a des échecs cuisants, mais aussi des succès retentissants. Alors je reste optimiste. Cela dit, la démocratie, ce n’est pas instantané. Il ne suffit pas de mettre un peu de café dans un verre d’eau chaude et hop, ça y est ! Non. Il n’y a pas de démocratie Nescafé.
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