L’honneur perdu
 de Moubarak

En donnant son feu vert à l’offensive israélienne contre Gaza, le président égyptien s’est totalement déconsidéré aux yeux des siens et de la « rue arabe ».

Publié le 13 janvier 2009 Lecture : 2 minutes.

Lâche, capitulard, complice d’Israël… Les insultes de la « rue arabe » pleuvent sur Hosni Moubarak depuis sa rencontre avec Tzipi Livni, la ministre israélienne des Affaires étrangères, à la veille du déclenchement de l’attaque israélienne contre Gaza. Retranché dans son palais de Charm el-Cheikh, loin de la colère des foules égyptiennes, le raïs n’en a cure ; les dirigeants israéliens continuent à parler de lui comme d’un « allié », le président américain sortant George W. Bush l’a félicité pour son rôle dans la crise et le président français Nicolas Sarkozy lui a rendu visite en « ami ».

Après avoir longtemps donné l’illusion d’être un acteur clé de la région, Moubarak, 80 ans, apparaît aujourd’hui comme une victime collatérale d’une guerre qu’il a favorisée par sa politique. Un quotidien cairote va jusqu’à le comparer à « une star de cinéma vieillissante qui blâme les autres pour sa perte de glamour ». À l’instar de Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne, celui qui passait pour l’un des chefs d’État capable d’arrêter la machine de guerre israélienne est totalement décrédibilisé. Les négociations dites « de paix » avec Tel-Aviv et Washington dans lesquelles les deux hommes s’étaient résolument engagés n’ont rien donné. Pire : Abbas et Moubarak ont, avec les encouragements de Bush et d’Israël, concentré leurs attaques sur la résistance palestinienne, désormais incarnée par le Hamas, et soutenu le blocus israélien, qui a transformé Gaza en une prison à ciel ouvert. Moubarak a fermé le point de passage de Rafah, faisant valoir qu’il avait besoin de l’autorisation d’Israël pour l’ouvrir.

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Le chef de l’État égyptien a donné l’impression d’avoir délivré un blanc-seing à Livni, qui a lancé sa déclaration de guerre contre Gaza depuis Le Caire. Présent, Aboul Gheit, le ministre égyptien des Affaires étrangères, qui avait menacé quelques mois plus tôt de briser les os des Gazaouis qui tenteraient d’entrer en Égypte pour s’alimenter, a affirmé que le Hamas serait tenu pour responsable de ce qui arriverait à Gaza. Moubarak a même manœuvré pour ralentir l’action arabe commune afin de garder son monopole en matière d’action diplomatique. Il a réussi à empêcher la tenue d’un sommet arabe extraordinaire dès le début de l’attaque, donnant ainsi à l’armée israélienne plus de temps pour finir le « nettoyage » de Gaza.

Affaibli aussi à l’intérieur, Moubarak réduit d’autant les chances de son fils Gamal de lui succéder. Tout comme celles d’Omar Souleimane, son chef des services secrets, lui aussi roulé dans la farine par les Israéliens. « Dans les relations internationales, écrit Nael Shama, un politologue égyptien, le pouvoir peut survivre sans légitimité, et la légitimité peut survivre sans pouvoir. Mais n’avoir ni l’un ni l’autre est désastreux. »

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