Herman Van Rompuy

Premier ministre belge

Publié le 5 janvier 2009 Lecture : 3 minutes.

Peu de Belges le savent, mais leur nouveau Premier ministre connaît bien l’Afrique. Il y a même vécu pendant deux ans, en 1957 et 1958, lorsque l’actuelle RD Congo était encore une province du royaume de Baudoin Ier. Invité en juin dernier par le président de l’Assemblée nationale congolaise Vital Kamerhe à l’occasion du 48e anniversaire de l’indépendance, Herman Van Rompuy, 61 ans, a tenu à le rappeler : « Ma famille vivait à Kinshasa. J’avais alors 10 ans. J’ai revu les quartiers de Kalina, où mes sœurs allaient à l’école, et de Limete, que je fréquentais. La ville a changé… »

Loin des propos désobligeants du ministre des Affaires étrangères, le Flamand Karel de Gucht, le nouveau chef du gouvernement, s’est aussi félicité du regain d’activité parlementaire dans un pays qui sort de la crise. « Cette nomination est une bonne nouvelle, explique le député belgo-­congolais de Bruxelles Bertin Mampaka. Van Rompuy connaît bien les affaires internationales. Du temps où il était simple élu, il recevait régulièrement ses homologues du Sud. » Sa connaissance des Grands Lacs ne sera pas de trop au moment où la Belgique pourrait être amenée à se prononcer sur l’envoi de soldats pour constituer une force internationale d’interposition entre l’armée et les rebelles de Laurent Nkunda dans l’est du pays.

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Mais, en attendant, le Premier ministre a d’autres pro­blèmes beaucoup plus urgents à régler. Il prend les rênes d’un pays au bord de l’implosion après dix-huit mois de querelles politiques et de scandales qui ont conduit à la démission d’Yves Leterme, le 19 décembre. Une situation à laquelle son parti, le CD&V (chrétien-démocrate flamand), n’est pas étranger, puisqu’il réclame toujours davantage d’autonomie pour la Flandre, prélude, pour certains, à l’éclatement de la nation. Si Van Rompuy, fédéraliste, s’y oppose, il milite néanmoins pour le régionalisme et se dit favorable à une scission de l’arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde. D’épineuses discussions l’attendent sur ce dossier au Parlement dès le 16 janvier.

Autre sujet explosif : la désignation et le fonctionnement de la future commission d’enquête sur Fortis, chargée de faire la lumière sur les pressions qu’aurait exercées Leterme à l’endroit de la justice pour faire accepter le plan de cession du fleuron bancaire national. Van Rompuy devra également trouver des solutions pour relancer l’activité, faire adopter le budget 2009 et conclure les délicates négociations entre syndicats et patronat.

Diplômé en philosophie et en économie, ancien banquier, ministre du Budget de 1993 à 1999, l’ex-président de la Chambre des députés ne manque pas d’atouts. « C’est l’un des derniers hommes d’État. Il est intelligent, pragmatique et a le sens du devoir », soutient Mostafa Ouezekhti, ancien député d’origine marocaine. Comparé par la presse tantôt à Mazarin, tantôt à Richelieu pour ses convictions catholiques et son physique d’ascète, ce parfait bilingue natif de Bruxelles fait figure de conservateur discret. Il ne voulait d’ailleurs pas du poste que lui proposait le roi Albert II. Les pressions politiques et la nécessité pour son parti d’assumer sa victoire aux dernières législatives l’ont conduit à l’accepter.

À quatre exceptions près, Van Rompuy a reconduit l’ensemble du gouvernement Leterme, attelage improbable de cinq formations : chrétiens-démocrates et libéraux côté flamand et wallon, plus les socialistes francophones. Aucune figure de l’immigration n’y est représentée. « On a reculé ces dernières années en revenant au “blanc bleu belge” [race bovine qui constitue 45 % du cheptel national, NDLR] », commente Mostafa Ouezekhti… Pour autant, ce gouvernement ne devra pas oublier les questions sociales et se pencher sur la régularisation des sans-papiers, au bas mot 100 000 personnes. « Est-ce le moment d’aborder cette question à six mois des élections régionales ? se demande Mampaka. Le risque est d’aboutir à une demi-mesure. »

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Les éternelles querelles entre Flamands (60 % de la population) et Wallons (40 %) devraient très vite resurgir. Les partis de droite et surtout de l’extrême droite, comme le Vlaams Belang, ne manqueront pas de faire monter les enchères, compliquant un peu plus le dialogue au niveau fédéral. Le nouveau Premier ministre a hérité d’une mission impossible… mais il se doit de réussir, sous peine de voir les plus radicaux s’inviter au pouvoir à la faveur de législatives anticipées.

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