Pascal Sevran était-il raciste ?

Publié le 30 décembre 2008 Lecture : 2 minutes.

« La mort est au bout de leur bite » : pendant une heure, le 18 décembre, ce propos fleuri a embaumé la 17e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris. Publié dans Le Privilège des jonquilles, septième tome du journal intime de l’animateur de télévision et parolier Pascal Sevran, il faisait l’objet d’une plainte pour « provocation à la discrimination et à la haine raciale » déposée en décembre 2006 par la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) et l’État du Niger. Pascal Sevran étant décédé en mai dernier, ce sont les représentants de son éditeur, Albin Michel, qui ont comparu à la barre.

Les Nigériens se sont en effet sentis injuriés par un passage particulièrement scabreux du livre. Morceau choisi : « Le Niger. Safari-photo insoutenable. Des enfants que l’on ramasse à la pelle dans ce pays (est-ce un pays ou un cimetière ?) où le taux de fécondité des femmes est le plus élevé du monde. Neuf enfants en moyenne par couple. Un carnage. Les coupables sont facilement identifiables, ils signent leurs crimes en copulant à tout-va. »

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« Page abominable », « propos insupportables », « complaisance avec le mépris », s’est insurgé Me Christian Charrière-Bournazel, l’avocat de la Licra, qui a demandé 1 euro symbolique de dommages et intérêts. « On stigmatise les hommes du Niger », a pour sa part regretté Me Sale Djibrillou, l’avocat de l’État, qui dénonce un « préjudice collectif et social ».

En face, Me Christophe Bigot, l’avocat d’Albin Michel, cite les critiques élogieuses dont Le Privilège des jonquilles a bénéficié dans la presse et précise le contexte qui a conduit l’auteur à cet épanchement macabre : le visionnage d’un documentaire sur la famine au Niger. Ces phrases, a-t-il soutenu, sont celles d’un « homme terrifié par des images ». Son argument principal est que le Niger n’est pas spécialement visé dans cette histoire ; et que Sevran aurait pu citer n’importe quel autre pays pauvre.

L’affaire a été mise en délibéré, le jugement sera rendu le 5 février prochain. En attendant, les admirateurs de Sevran chercheront en vain le passage incriminé du Privilège des jonquilles dans l’édition que le Livre de poche a publiée en janvier dernier : il a été supprimé.

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